Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

LÉGISLATIVE (22 FÉVRIER 1702) 335

demeurer avec eux. Quel style M. Manuel emploie en écrivant aux rois (1)! Le département de l'Eure vient de placarder un arrêté contre les prêtres rebelles. À l’en croire, tout est perdu, la guerre civile et extérieure est assurée; il parle de soufre, de bitume, d’explosion, de forces souterraines; il n’y a point de force comprimante, le terraïîn est trop faible pour contenir les éruptions; il parle de massacres, etc. Je crains l’effet de ce beau préambule, qui peut devenir le signal d’une horrible persécution contre les réfractaires, et nous faire passer pour les plus intolérants des hommes. J'ai eu intention, je ne sais si je l’ai exécutée, de vous prier de me faire passer le bref de Rome, s’il en paraît, et aussitôt qu'il en paraîtra.

.…..]Je fais faire quelques prêtres; ma pépinière est bientôt épuisée, je ne pourrai pas fournir à toutes les demandes. Nous serons bientôt forcés d’ordonner de bons citoyens pères de famille, si nos séminaires ne se remplissent pas. Si vous décrétez qu'il n’y aura qu’un séminaire par métropole, vous ferez aussi bien de décréter la suppression entière; l'effet sera à peu près le même. Nous avons beaucoup de curés paralysés; beaucoup sont morts; plusieurs, qui avaient été laissés dans leur bénéfice, se font chasser; il ne se fait point de réunions (de paroïsses) ; il sera impossible de pourvoir à tout; il y a environ moitié de paroisses superflues dans quelques districts du département. CCIX.— Au même. Évreux, le 22 février 1792. [Th. Lindet transmet à son frère les compliments de M. et M" Passot. Il continue ensuite :]

Les neiges vont retarder l’arrivée des émigrés.

(1) Allusion à la lettre de Manuel à Louis XVI : « Sire, je n'aime pas les rois... ». Sur cette lettre, voir la revue la Révolution française, t. XXXW, P. 519.