Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

350 GORRESPONDANCE DE LA FAYETTE

Avouez, mon cher cœur, que si Anastasie n'était pas restée en Hollande, Charles serait à présent en France, que vous seriez partie avec vos deux filles pour Chavaniac, ce qui aurait facilité une importante affaire. Je réponds à Wittmold et à Ploen que je partage sur tout cela leur opinion unanime, mais je diffère sur un point: je dis qu'après n'avoir mandé que vous attendiez ma réponse, dès que vous l'aurez reçue, vous aurez cherché tout de bon à réussir; le tête-à-tête de Hollande n’a pu que leur être agréable ; mais, à moins de négliger tout autre soin, je crains qu’il n’augmente pas les chances futures de réunion. Obtenez donc sur-le-champ cette surveillance, à moins que Charles, qui la désirait, vous ait mandé clairement qu'il n’en veut point. Il me semble que le moyen que je vous ai indiqué évite en grande partie ce que vous avez craint. Je ne me crois point le droit de disposer de lui, mais en parlant pour ce qui vous déplait, je crois lui rendre son indépendance; au reste, vous avez peut-être déjà tout arrangé le mieux possible. Ce n'est pas sans une vive émotion, mon cher cœur, que je pense à votre arrivée dans les bras de ma tante’. Je ne puis penser, sans que la tête me tourne, à ce que j'éprouverais en y arrivant. Nous venons de recevoir une lettre d’elle datée en fructidor*; je vois avec grand plaisir que la citoyenne Chapelain s’établira tout à fait avec elle. Je suis charmé que le citoyen Guintrandi soit débarrassé de sa loupe. Dites-lui que je sens profondément tout ce qu'il a été pour nous. Nous avons reçu par Passy des nouvelles de mon petit-fils. Sa mère ne m'en parle

1. Mwe de Chavaniac. 2. C'est-à-dire du mois précédent,