Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

362 CORRESPONDANCE DE LA FAYETTE

que vous voudrez, vous ne m'avez rien écrit qui n’eût satisfait mon cœur, et que si je m'étais permis une observation sur vos penchants bien naturels dans les circonstances actuelles, c'est parce que je connaissais le vœu de Victor et croyais connaître celui de Charles, mais que dans aucun moment je n’ai été mécontent de votre manière de parler et d'agir dans nos affaires. Je vous répète encore que je suis persuadé que vous avez fait ce qu’il y avait de mieux, et, bien loin d’avoir cherché dans la nouvelle de M. Bart... un moyen de vous tourmenter, j'ai tout simplement pensé que l'argent des aristocrates avait eu plus de succès que le bon droit des patriotes. Au reste, je ne parle que pour mes amis, car si on nr'offrait aujourd'hui de rentrer, j'ajournerais mon acceptalion. J'aime à penser que cette lettre vous trouvera plus calme sur la fausse idée que vous aviez prise de ma disposition; il y a trop de réalités affligeantes pour se créer des contrariétés imaginaires.

C’est avec beaucoup de chagrin que je vous vois renoncer à l’idée de revenir au mois de décembre; j'avais déjà pris mon parti pour l'affaire de Hollande ; je me disais : ou elle me mandera d'aller au-devant d'elle, ou je n'irai l'attendre qu'à Harbourg, mais, dans tous les cas, nous serons réunis pendant l'hiver et le printemps; Charles et sa femme logeront à Ploen, ce qui convenait mieux, pour des raisons trop longues à vous dire; Anastasie sera bien soignée par M. Siddon, et au printemps nous déciderons si je dois les accompagner à la frontière et, suivant les circonstances, m’embarquer là, revenir ici, ou rester quelque temps en Hollande. En un mot, je voyais devant moi quelques mois très agréables et je n'allais pas lire au grimoire de l’avenir; mais votre déci-