Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

132 DANTON ÉMIGRÉ.

Eh bien, la guerre de propagande fut la conséquence naturelle et inévitable de la doctrine révolutionnaire des droits de l'Homme ou de la souveraineté populaire, appliquée aux relations internationales.

Ces droits, cette souveraineté étant déclarés absolus et universels, propres à tout le genre humain, sans exception de temps ni de lieux, la royauté, où qu’elle subsiste, est illégitime et contre nature, c'est une tyrannie, une usurpation, une monstruosité sociale, et le devoir de tout peuple libre est de la renverser pour rendre à la nation opprimée ses droits primordiaux et inaliénables, sa liberté naturelle.

Telle est la doctrine.

Quant à la politique qui en dérive, elle ne se trouve ni moins absolue ni moins assurée; chez tout peuple libre ou en possession des droits primordiaux, la guerre ne peut avoir qu'un seul but : affranchir les nations opprimées et renverser leurs oppresseurs ; c’est la guerre des peuples contre les rois, et tout peuple libre la doit aux peuples qui veulent sortir de l'esclavage.

Toutefois, d’abord fixée en théorie, la propagande armée eut bien des tâtonnements dans la pratique, pour arriver presque aussitôt à une fin de non-recevoir absolue.

Les premiers croyants, les purs, eussent voulu qu'une fois tous les tyrans renversés et chassés, chez les peuples qui nous environnaient et qui nous appelaient à leur aide, nous laissassions ceux-ci entièrement libres, maîtres de leurs destinées. C'était le rêve dans toute sa candeur! Mais voilà que les nations affranchies elles-mêmes, sachant et redoutant leur propre faiblesse et le retour inévitable de leurs anciens maîtres, refusèrent tant de libéralité, et demandèrent à cor et à cris, on peut le dire, non seulement la protection effective de la France, mais leur incorporation formelle à la République. I fallut donc aller plus loin, bien au delà de ce que désiraient d’abord l'abbé Grégoire, Lasource, Bancal ou Gensonné, et c’est alors que surgit la systématisation de J.-B. Cloots, plus tard Anacharsis. Acceptée par Brissot