Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

LA POLITIQUE DE DANTON. 159

tellectuel et moral du genre humain, la religion de l'Humanité. La thèse cosmopolite reposait encore sur deux sup-

ositions qui n'avaient aucun fondement objectif : d'abord, elle attribuait à tous les peuples voisins de la France la volonté, l'aptitude et la situation qu'elle avait eues elle-même, pour secouer le joug de leurs gouvernements respectifs; ensuite, elle séparait, par une opération mentale purement subjective, par une abstraction chimérique, les peuples de leurs gouvernements, empereurs où rois, et croyait qu’on pouvait faire la guerre à une nation en n’attaquant et ne molestant que ces derniers, sans porter aucune atteinte aux intérêts et à l'honneur des sujets, sans offenser leur patriotisme ni alarmer leurs susceptibilités nationales les plus légitimes.

L'expérience a prouvé qu'il n'en était rien.

Prétendre, comme Cloots et la Commune de Paris, à municipaliser, départementaliser et républicaniser toute la terre par l’action militaire de la France et sous la direction centrale de Paris, au moyen de la guerre de pro-

agande, était donc bien une pure extravagance !

C’est pourquoi Danton, de si bonne heure, rompit en visière au système propagandiste; c’est pourquoiilavertit

_ si péremptoirement et si vite la Convention nationale et lait changer de piste; c'est pourquoi il renonca même bientôt aux annexions, à toute conquête, et voulut seulement, par la guerre et par la diplomatie, faire poser les armes à la coalition, la détruire, en un mot, en s’indemnisant des frais de guerre et obtenant de chacune des puissances belligérantes qu’elle reconnût officiellement la République française, au nom de la liberté et de l'indépendance que réclamaient la raison et la justice pour tout Etat constitué.

Voilà sa politique,

Mais elle n’arriva pas d'emblée, — nous le croyons du moins, — à ce degré de précision et de perfectionnement; elle eut des phases successives, elle suivit, sous la pression des événements, une évolution que nous devons rappeler ici.