Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

PIÈCES JUSTIFICATIVES. 215

généraux et aux commissaires français toutes les connaissances locales qui peuvent faciliter l'exécution du décret. Sans doute ils vous ont donné avis de leur rétractation.

Sans doute ce décret nous eût élé bien plus avantageux si les prêtres et les moines n'avaient pas eu le temps d’en prévenir l'effet en cachant, dilapidant ou emportant hors du pays une grande partie de leurs richesses mobilières. Cette sorte de ménagement qu'on a eu pour eux, en leur laissant en mains tous les moyens de séduction, a été la seule cause de l’état d’apathie dans lequel la Belgique paraît plongée depuis deux mois. Ces ménagements ont fortifié l'esprit de l'aristocratie : la faction orange, anglaise et prussienne intriguait publiquement dans la Belgique, et la classe éclairée du peuple, qui n’apercevait point de plan fixe dans la marche des Français, se tenait enfermée, ne prenait aucune part aux affaires de la patrie et se laissait aller à la crainte de voir encore rentrer les Autrichiens qu'elle a en horreur.

Nous avons souvent entendu calomnier les Belges; on croit avoir tout dit, quand on a dit que les Belges sont fanatiques et qu'ils ne sont point encore mürs pour la liberté.

Législateurs, n’attribuez ces diatribes qu'au funeste modérantisme, qui croit parvenir par ces moyens à ses vues particulières et rendre étrangers l’un à l'autre deux peuples que les mœurs et le climat doivent rendre amis. 11 y a moins de différence entre Paris et Bruxelles qu'entre Marseille et Paris. Dirat-on que les Marseillais et les Parisiens ne doivent pas être amis? Quant au fanatisme, ne croyez point que le Belge le porte à un degré qui le rende incurable. N’avons-nous pas vu en février 1791 le peuple de Bruxelles baïouer ses moines par l’instigation du gouvernement autrichien (sic) ?

Le Belge soutient ses nobles et ses moines parce que depuis 1787 ces corporations usurpatrices ont eu l’art de persuader à ce peuple que la destruction d'un baillage ou d’une abbaye entrainerait la ruine d'une constitution à laquelle il est attaché, parce qu'on lui a fait croire faussement que l’état d’aisance dans lequel il vit lui est attribué. Il ne sait pas, ce peuple, qu'il ne doit cet état qu'à la ferlilité de son sol et qu'une constitution plus sage le ferait jouir de plus grands avantages. Sans doute l'ouverture de l'Escaut et la libre circulation du commerce entre des provinces jusqu'ici divisées ne tarderont pas à lui dessiller les yeux.

On accuse le peuple belge d'inertie : un peuple qui s’est si biert montré en 4787 et en 1789 n’est point un peuple sans énergie.

Lorsque les Belges auront lu dans les instructions données aux commissaires du pouvoir exécutif qu'il peut s’'abandonner avec