Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

26 DANTON ÉMIGRÉ.

conséquent, on devait le considérer comme ayant joué le rôle d'agent provocateur dans ce guet-apens meurtrier (1).

En effet, les Votes de Topino-Lebrun, juré au Tribunal révolutionnaire, dont nous avons, le premier, fait connaitre les passages essentiels, portent, au lieu de la substitution impudente inscrite dans la feuille de Nicolas et de Robespierre, la réponse suivante faite par Danton au président :

« J'ai été décrété de prise de corps pour le Champ-deMars. J'offre de prouver le contraire (2) et lisez la feuille de l'Orateur (3) : des assassins furent envoyés pour m'assassiner à Arcis, l'un a été arrêté (c'est sans doute celui dont Courtois rapporte l'aventure). — Un huissier vint pour mettre le décret à exécution, je fuyais donc (sic), et le peuple voulut en faire justice. J'étais à la maison de mon beau-père; on l’investit, on maltraita mon beau-frère pour moi. Je me sauvai à Londres. Je suis revenu lorsque Garran fut nommé. On offrit à Legendre 50,000 écus pour m'égorger (4). »

Voici l'explication de ce texte, si décisif, malgré son obseurité : ce n’est point en 1789, mais bien en 1791, aussitôt après l'affaire du Champ-de-Mars, que Danton passa en Angleterre. Décrété de prise de corps, il quitta Paris et se rendit à Areis, où des malfaiteurs furent envoyés à sa poursuite; l’un d'eux, reconnu et arrêté, faillit être mis en pièces par la population. Alors, Danton se rendit à Troyes, chez un ami, le procureur général

{1} On sait que, dans l'Histoire parlementaire, Buchez et Roux se sont empressés d'accepter cette manière de voir et de l’appuyer à leur façon.

(2) C'est-à-dire qu'après l'affaire du 17 il ne jouit pas d’une parfaite tranquillité, comme l'affirmait Saint-Just dans son rap-

ort.

(3) L'Orateur du Peuple, rédigé par Martel (Fréron), T. VIT, n° 45, où se trouve un article confirmatif de Courtois, commandant de la garde nationale d'Arcis-sur-Aube, relatif aux poursuites exercées contre Danton à la fin de juillet 1791. .

(4) Notes de Topino-Lebrun, édition Chardoïillet, in:80, Paris, 1875,