Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

46 DANTON ÉMIGRÉ.

nions viendront se ranger et nos jugements chercher un appui solide. Nous n'avons que du bon sens; mais nous le croyons juste et droit. Nous voulons nous débarrasser de ces liens magiques dont une éloquence corrompue et séduetrice vient vainement d’essayer le pouvoir pour courber de nouveau la liberté et réprimer la force invincible du genre humain; et sans nous laisser ni éblouir par le talent, ni abrutir par des subtilités mystiques, nous voulons penser et déclarer nos sentiments, non comme politiques, mais comme hommes et comme Volontaires.

« Comme hommes, nous pensons que le gouvernement est une convention à l'usage du peuple, — du peuple, en prenant dans son sens le plus étendu ce mot souvent si mal compris. Nous pensons que le bien public est le but du gouvernement, et que les formes du gouvernement ne sont que des moyens d'atteindre ce but; moyens qui peuvent sans cesse être modifiés ou changés par la véritable volonté publique, cette volonté suprême, cette autorité souveraine de toutes les autres. .

« Comme citoyens, nous pensons qu'un peuple ne peut promettre d'obéissance que condilionnellement, et qu'elle cesse d’étre un devoir quand la volonté du peuple cesse d’être la loi du pays.

« Comme Volontaires, nous pensons que la force du peuple doit être employée à garantir la liberté, et que la liberté est le seul garant sûr du bonheur public.

« C'est donc à ces points que nous nous fixons, et, véritablement, si l'on demande : Que nous importe la Révolution de France? nous répondrons : beaucoup!

« 19 Beaucoup en notre qualité d'hommes.

« C’est un bonbeur pour la nature humaine que le gazon croisse où jadis s'élevait la Bastille. Nous nous réjouissons d’un événement qui rompt le charme par lequel la France entière était relenue dans la servitude d'une bastille civile et religieuse. Quand nous voyons cette énorme et funeste forteresse d'abus cimentés seulement par l'habitude, construite sur l'ignorance d’un peuple abattu, quand nous la voyons ébranlée sur ses fondements et soudain réduite au niveau de l'égalité du bien général, nous marquons notre joie à cette résurrection de la nature humaine et nous félicitons notre frère, l’homme sortant de ces souterrains perséculeurs et de ces caveaux affreux de la mort; nous félicitons Île monde chrétien de ce qu'une grande nation renonce à toute idée de conquête, et publie glorieusement le premier manifeste d’humanilé, d’union et de paix. En reconnaissance d’un tel présent, nous prions le Dieu de paix d'habiter pour toujours celte terre bienfaitrice, et de ne jamais permettre que le triple despotisme