Discours de M. le général Cubières, pair de France, ancien ministre de la guerre, membre du Comité d'infanterie : recueillis et précédés d'une notice historique par un officier de l'ancienne armée

re sachez, messieurs, que les marchés passés en Suède par un grand nombre de fabricants d’aciers de l'Angleterre sont au moment d’expirer, et que si les fabricants français ne sont pas mis à même d’entrer en partage dès cette année, ils se verront exclus des marchés de Suède pour vingt, trente ou quarante ans, car c’est à ces longs termes que se passent ordinairement les marchés de fers entre les fabricants anglais et les propriétaires des mines de Suède.

Jarrive à ma dernière observation. Ne rien changer à la situation actuelle, laisser subsister indéfiniment le droit qui fait obstacle chez nous à la fabrication des bons aciers par nos propres mains, c’est déshériter d'avance les ouvriers en métaux, portion nombreuse et intelligente des artisans français ; c’est les déshériter de tous les travaux que semblait leur promettre l’établissement du matériel des nombreux chemins de fer à créer, c’est priver plus de cent mille familles de l’aisance que de si grands travaux réservaient à leur avenir. Cela est évident, et il n’y a pas d'illusions à se faire ; car, enfin, il arrivera que les compagnies concessionnaires des chemins de fer, ainsi que les entrepreneurs sous-traitants, forcés de recourir aux achats d’aciers à l’étranger, auront tout avantage à se fournir d’aciers ouvrés. Bien que le droit soit plus élevé, l'importation d’objets ouvrés offrira des économies de temps et sur le frais de transport. C’est ainsi que les Français perdront la plus grande part de la main-d'œuvre sur le matériel des chemins de fer, pour en faire profiter des bras étrangers.

C’est la cause d’une partie notable des ouvriers français que je plaide devant vous; j’ose espérer, messieurs, que vous vous chargerez de la faire triompher.