Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

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de l’ègalisation dont Clermont-Tonnerre fut le premier chef n’en comptait que 46. Lorsque les 46 arrivèrent dans la salle où siégeait le tiers état afin de procéder en commun à, la vérification de leurs pouvoirs, il marchait à leur tête. Ce fut lui qui porta la parole en leur nom. « Nous cédons, dit-il, à l'impulsion de nos consciences et nous remplissons un devoir... Nous sommes pénétrés de la sensibilité la plus vraie pour la joie que vous nous avez témoignée; nous vous apportons le tribut de notre zèle et de nos sentiments, et nous venons travailler avec vous au grand œuvre de la régénération publique (1). » Le grand mot était lâché : la régénération publique! Il n’y avait plus ni noblesse, ni clergé, ni tiers état; il n’y avait plus que la chose pablique. Clermont-Tonnerre venait de donner la pre” mière formule dela démocratie. En même tempsil avait jeté quelques fleurs sur les dissidents de la noblesse : « Arrêtés, avait-il ajouté, par des mandats plus ou moins impératifs, ils cèdent à un motif aussi respectable que le nôtre! » Puis, les fleurs jetées, il avait résolüment marché dessus.

Le lendemain, à la tribune des États, il rompait non sans habileté avec son ordre, lequel avait admis que le veto de l’un des trois ordres suffisait à invalider la décision des deux autres. Il mettait des formes à la rupture parce qu’il était bien élevé; mais il annonçait que les électeurs de Paris lui avaient personnellement donné un mandat tout différent. Au veto de la noblesse, il opposait le veto populaire.

(4) Séance du 25 juin 1789.