Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

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son démocratisme s'affirma en dehors de l’organisation de cette royauté populaire dont il avait rêvé l’établissement. Au début des États généraux, la surexcitation à Versailles est extrême. Nobles, prêtres sont poursuivis de huées. Un jour, « un orateur d’estaminet propose de brûler la maison de M “**, député de la noblesse, de maltraiter ses enfants et sa femme, de lui prendre tout son bien, le tout pour se venger du mépris imprudent que ce magistrat témoigne au tiers. Monsieur, vous êtes une bête, s’écrie un quidam. Vous proposez de brüler la maison de M***? elle n'est pas à lui; elle est à un honnête citoyen, à un zélé partisan de notré cause. Vous voulez maltraiter ses enfants et sa femme? mais ses enfants ne sont pas de lui, mais sa femme est à tout le monde... Vous dites enfin qu’il faut piller ses biens? mais son bien est à ses créanciers (1). »

De ces sarcasmes aux actes criminels, il n’y a pas loin. Clermont-Tonnerre ne perd pas une occasion de modérer la morgue des intransigeants de sa caste. Témoin sa réponse aux réserves intempestives du cardinal de la Rochefoucauld, le 2 juillet 1789, et la façon dont il cingla Son Éminence.

Quel était le degré de foi religieuse de notre gentilhomme? La question de savoir qui de la nation ou du clergé était propriétaire des biens d'église

(1) Dépêche du baïlly de Virieu. 6 juillet 1789, Archives de Parme.