Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

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à dire la messe dans les églises paroissiales ou les oratoires nationaux, ces mots : « L'Assemblée déclare que les principes « de la liberté religieuse, qui ont dicté l'arrêté du rx avril, « sont les mêmes qu'elle a reconnus et proclamés dans sa « Déclaration des Droits. »

Mais les voix qui conseillaient le respect de Ja liberté de conscience furent dominées par les cris de haine politique et confessionnelle. L'Assemblée législative, puis la Convention, se virent entraiînées sur la pente glissante de la persécution systématique.

$ 2. — À parüir de novembre 1791, les rôles furent renversés : l'Église catholique de France, de dominatrice qu'elle avait été jusqu'en 1787, passa à l'état de persécutée, et les philosophes et les Jansénistes, ses anciennes victimes, érigés en législateurs et en souverains, lui firent subir mille vexations.

Les prêtres catholiques, réfractaires au serment, se virent placés dans la situation des ministres réformés après la révocation de l'Édit de Nantes : ils furent dépouillés des temples et presbytères, privés de toute pension, traqués comme des rebelles et des malfaiteurs. Dans ces conjonctures, les simples curés ou les desservants eurent plus de courage que les évêques qui émigrèrent en masse; ils restèrent presque tous à leur poste, exerçant en secret leur ministère, auprès de petits troupeaux fidèles.

Les chefs du parti royaliste et catholique en France n’observèrent pas mieux les vrais principes de la liberté de conscience que les Jacobins, leurs adversaires ; ils eurent surtout le tort d'y mêler des questions d'intérêt temporel ou d’ordre politique. Ainsi, l’abbé Maury envoya à Pie VI un mémoire conçu dans les termes les plus violents contre les lois concernant l'Église, votées par l'Assemblée constituante, mémoire où il ne rougissait pas de faire l'apologie de la révocation de l'Édit de Nantes ! Le bouillant abbé, en l’écrivant, oublia sans doute qu'il avait eu un ancêtre huguenot, Jean-Louis Maury, pendu par ordre du général Julien pendant la guerre des Camisards. Les mémoires et les lettres de l’abbé Sifferin de Salamon,