Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
DE L'ÉDIT DE TOLÉRANCE JUSQU'A LA CHUTE DE NAPOLÉON 107
leur ministère dans leurs églises était de faire acte de soumission aux lois de la République, en présence de la municipalité. Dans cet acte, il n’était pas question de la Constitution civile du clergé et la circulaire du Comité de législation (du 29 prairial) recommandait d'interpréter le serment dans le sens large, sans s’enquérir du passé ou des opinions politiques du ministre du culte. Aussi, des prêtres éclairés, l'abbé Émery entre autres, qui avaient toujours refusé le serment à la Consüitution civile, étaient-ils d’avis qu’on pouvait faire cet acte, tout en restant bon catholique, et le Pape, par son bref du 5 juillet 1796, semblait approuver cette manière de voir. C’est de cette législation libérale et non pas du Concordat que date réellement la restauration du culte catholique en France. Quelques évêques constitutionnels, Grégoire en tête, sans s’inquiéter de la suppression de leurs traitements, adressèrent aux prêtres et aux fidèles de leur église une encyclique (le 15 mars 1795) où ils les invitaient à rétablir le culte catholique et à faire face à leurs nouveaux devoirs. Ils fondèrent à Paris la Société de philosophie chrétienne qui, par ses publications, — les Annales de la religion notamment — avait pour objet d’instruire et de stimuler le zèle des prêtres de campagne. D'autre part, l’évêque de Blois s’efforçait, par des appels généreux, de réconcilier avec l’Église constitutionnelle les prêtres réfractaires, et de mettre fin à un schisme, qui, en se prolongeant, serait funeste au catholicisme ; mais il échoua dans cette partie de sa tâche. Les prêtres non assermentés étaient tellement aigris par la persécution et dociles aux excitations politiques des émigrés qu'ils méprisèrent les sages avis de l’abbé Emery, comme les appels de Grégoire. Rentrés en foule depuis le 9 thermidor, surtout à Lyon, à Versailles et à Paris, la plupart ne profiièrent de la liberté que leur laissait la loi du 11 prairial que pour prècher la désobéissance aux lois, menacer les acquéreurs de biens nationaux et fomenter des troubles. Leurs intrigues ayant été dénoncées par Rewbell, la Convention recourut de nouveau aux mesures de rigueur.