Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE

conscience et les formes sous lesquelles elle se produit au dehors : le culte, l’enseignement, la propagande. La première, étant tout intérieure, ne gêne personne ; le pouvoir civil n’a pas à s’en inquiéter, car la religion qui est avant tout une force morale et spirituelle est un bien privé. On peut même, comme le faisaient les édits de pacification donnés par les rois de France avant l'Édit de Nantes, laisser pleine liberté au culte domestique. Au contraire, dès qu'une religion se manifeste en public, elle intéresse l'État, gardien du bon ordre, car elle exerce une action et peut déterminer une réaction dans la société environnante, elle pourrait amener des adhésions ou des protestations tumultueuses et, par suite, provoquer des conflits violents avec les cultes ou partis adverses. N'est-ce pas cette liberté d'exercice des cultes, concédée par le chancelier de L'Hôpital, qui a causé le massacre de Vassy et la sanglante traînée des guerres de religion au xvi° siècle ?

L'objection est plus spécieuse que fondée. Sans doute l'État a le droit et le devoir de prendre des mesures de police extérieure, pour empêcher que les cultes ne fournissent occasion ou prétexte à des troubles dans la rue. Mais, ces précautions une fois prises, la liberté et la protection assurées À l'exercice de tous les cultes ne peuvent que contribuer à la paix en donnant une satisfaction normale au besoin des âmes. C’est justement parce qu'on la refusait aux Hugucnots, parce qu'on les avait poussés à bout et froissés dans leurs convictions intimes, qu'ils ont recouru à la force pour conquérir la liberté de conscience. Une conviction ardente ressemble à la vapeur d'une chaudière : ouvrez-lui un canal, elle deviendra un moteur précieux, si, par contre, Vous lui fermez toute issue, elle fera sauter les parois de sa prison, dont les éclats blesseront les imprudents auteurs de la compression.

On soulève une autre objection contre la liberté de conscience absolue. Il faut distinguer, dit-on, entre l'intolérance théologique ou d'église et l'intolérance civile, c'est-à-dire de l'État. La seconde seule est mauvaise, mais la première est