Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
DE L'ÉDIT DE TOLÉRANCE JUSQU'A LA CHUTE DE NAPOLÉON 117
titution des Frères de la doctrine chrétienne et fondait aux frais du Trésor dix séminaires métropolitains.
Mais ces coquetteries entre Bonaparte et l’Église romaine n’empêchaient pas cette alliance d’être un mariage d'intérêt et non d’inclination; il devenait, dès lors, évident que, le jour où il ÿ aurait conflit d'intérêt ou de principe, le différend s’envenimerait.
Dès 1804, Pie VIT put s’apercevoir qu'il avait fait avec le Premier Consul un marché de dupe. Bonaparte, malgré les instances du Pape, et conformément à la Constitution de l'an XIT, jura de maintenir les lois du Concordat (y compris les Articles organiques) et la liberté des cultes. Le refus du Pape de prononcer le divorce entre Jérôme Bonaparte et sa première femme (miss Patterson), le retard des bulles d’investiture épiscopale demandées pour les nouveaux évêques, l'occupation d’Ancône et la menace de Napoléon d'entrer à Rome, si Pie VIL n’expulsait pas de ses États les sujets des puissances en guerre avec la France, tous ces événements précipitèrent la rupture. Le pape repoussa les exigences du conquérant par une lettre très ferme et très fière (21 mars 1806), où nous relevons ces belles paroles : « Ministre d’un « Dieu de paix, je ne dois m’'armer que pour la protection « de La foi. Je n’ai aucune raison pour rompre avec des gou« vernements héréliques ou schismatiques, il est vrai, mais « qui commandent à plusieurs millions de catholiques. Votre « Majesté a été sacrée empereur des Français, mais non pas « empereur de Rome. Si le cœur de Votre Majesté n’est pas « touché par nos paroles, nous sommes prêt à souffrir toute « sorte de calamité! »
Alors commença entre Pie VIT et Bonaparte ce duel inégal, où toute la force matérielle était avec le second, tandis que le Pape, représentant la liberté de conscience, ne disposait que de son autorité morale. On connaît les épisodes de cette lutte dramatique qui se prolongea sept années avec des alternatives de succès et de revers, mais qui se termina par la défaite de l’empereur.