Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

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devant le tribunal correctionnel d'Aix, qui confirma la condamnation. — Roman recourut derechef à la cour de cassation qui, le 26 novembre 1819, sur un réquisitoire de M. Mourre, procureur général, cassa définitivement l'arrêt de la cour d'Aix. Nous relevons dans la plaidoirie d'Odilon-Barrot, en faveur de Roman, ces belles paroles sur la liberté de conscience : « Ce qui vient du ciel est spirituel, « infini, aussi chaque homme doit avoir le droit d’adorer « son Dieu à sa manière. Ge qui est mental est au-dessus « de toute juridiction humaine ».

Mais le principe de la liberté des cultes courut un danger plus grand encore, lors des négociations pour le concordat de 1817. Les meneurs de la « Petite Église » et de la Congrégalion avaient inscrit en tête de leur programme l'abolition du concordat de 1807, — et surtout des Articles organiques. Ils n'étaient pas sûrs des évêques, ni même des archevêques, dont les uns avaient juré la Constitution civile, les autres avaient été les dociles instruments de Bonaparte dans sa guerre contre le Pape. N’y avait-il pas moyen d’épurer le haut clergé comme on avait fait pour l’armée? — on obtiendrait de Pie VIT la déposition d’une vingtaine d’intrus, qui feraient place à autant de nobles prélats, anciens émigrés !. — Il restait, d'autre part, à pourvoir à un certain nombre d’évêchés, dont les titulaires, nommés par l'empereur, n'avaient jamais obtenu du Pape l'institution canonique. Talleyrand-Périgord, grand-aumônier du roi, était le type de ces prélats de l’ancien régime, qui joignaient à toute la morgue de la noblesse les rancunes du clergé contre la Révolution. Il tâcha de persuader à son royal pénitent qu'il était de son devoir de « fils aîné de l'Église » de purifier ainsi l'Église gallicane et de lui rendre son ancienne splendeur. Mais

1. En 1816, Louis XVIII ayant, en vain, tenté d’obtenir la démission du cardinal Fesch, archevèque de Lyon, le fit comprendre dans l’ordonnance qui exilait tous les membres de la famille Bonaparte, et nomma à sa place, avec l'agrément de Pie VII, M. de Pins, administrateur apostolique .