Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
SOUS L'EMPIRE AUTORITAIRE (18b2-1800) 221
« contre l'erreur ». On voulait bien pourtant, tenant compte des lois modernes, tolérer les hérétiques. Mais, pour l'Univers, la liberté de conscience n’était qu'une « tolérance », une concession faite au malheur des temps.
Pour M. de Sacy, au contraire, comme pour Saint-Marc Girardin et les autres rédacteurs du Journal des Débats et du Correspondant, la liberté de conscience est un droit inhérent à la conscience humaine, c’est le droit reconnu à chacun de professer sa croyance et son culte, à la seule condition que ces derniers ne portent pas aiteinte à l’ordre social et à la tranquillité publique. Le pouvoir civil n’a pas le droit de se mêler des choses de l’ordre spirituel. Toutes les atrocités des guerres de religion ou des persécutions du xvi* et du xvrre siècle sont venues de la confusion de ces deux ordres. La liberté de penser et de croire, cette conquête de la Révolution, est assurée par leur distinction.
Lacordaire se prononça nettement pour celle dernière conceplion, dans un discours prononcé à l’Académie de législation de Toulouse! (2 juillet 1854) : « Selon l'esprit moderne, disait«il, la liberté religieuse n’est que le respect des convictions « d'autrui, tant qu'elles ne blessent pas l’ordre public par « un culte immoral. L'esprit moderne ne touche en rien à
_« l'autorité du christianisme, il lui retire seulement le secours « du bras civil pour punir l’hérésie, se fiant à la force intime « et divine de la foi. »
Or, pendant la première moitié du règne de Napoléon TT, la balance de l'Église pencha du côté de L. Veuillot et de la « tolérance », c’est-à-dire de l'arbitraire à l'égard des dissidents. Mais quand le parti ultramontain, enhardi par les faveurs impériales, essaya de faire brèche au Concordat et de détruire ce qui restait, dans l'Église de France, des traditions gallicanes, alors le gouvernement impérial se montra plus ferme. Ainsi lorsque le dogme de « l’Immaculée Conception » eut
1. V. OŒEuvres du P. Lacordaire, t. VII, Discours sur la loi de l'histoire, p. 283.