Histoire du blocus hermétique de la Suisse, pour faire suite à l'histoire du blocus continental : lettre à Lord Parmerston...

57

Comment se fait-il donc que les Cantons et le Vorort aient découvert d'eux-mêmes les projets signalés avec tant de soin par la France, qu'ils aient expulsé un grand nombre de coupables et livré quelques autres aux tribunaux, tandis que la France n’a pas encore pu atteindre les chefs , ni découvrir le mal caché dans son sein ? Comment se fait-il que précédemment déjà , elle n'ait ni prévenu , ni empêché l'évasion avouée de 200 Polonais et leur invasion en Suisse, et qu'elle n’ait pas davantage su arrêter sur son territoire le corps de réfugiés qui pénétra en Savoie sous les ordres de Ramorino ?

Si la Suisse réprime les étrangers dont les intentions criminelles se sonttrahies par des actes appréciables , elle ne saurait faire de même à l'égard de ceux dont on soupçonne simplement que les desseins se lient tout au moins d'intention et d'espérances à des crimes tentés en France. La Suisse, en vertu du Conclusum de la Diète du 25 août, prend des mesures contre les étrangers qui se sont rendus coupables par des faits constatés ; mais sa police ne descendra jamais dans leurs consciences pour y surprendre des intentions, et les tribunaux ne puniront jamais des espérances.

L'office de M. le duc de Montebello ne respecte pas assez les légitimes susceptibilités de la Suisse, lorsqu'il suppose le cas où elle manquerait à ses obligations internationales. La Confédération a montré par des faits qu'elle connaît ses devoirs sans qu'on les lui rappelle, et qu’elle les remplit sans qu'on l'en somme. Mais elle connaît de même ses droits, que sa position géographique n’affaiblit point. Aussi, nesaurait-elle admettre la prétention que d’autres qu’elle-même s'arrogent le droit de J'aire justice des réfugiés qui conspirent en Suisse, et de mettre un terme à la tolérance qu’elle exerce. La Diète repousserait de la manière la plus énergique une telle violation de la souveraineté fédérale, forte du droit d'un Etat souverain et indépendant , ainsi que de l’appui de la nation entière.

La Suisse s’est honorée pendant des siècles de mériter et d'obtenir l'amitié de la France ; elle s’est plu à entretenir des relations de bonne harmonie entre les deux pays ; ses régimens ont versé leur sang sous les bannières françaises; ils ont défendu le roi de France à Meaux , et combattu dans le palais