Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

288 LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT sans talents, sans mœurs, y fait la loi à une majorité trop indolente qui s'obstine à vouloir parler le langage de la raison à des factieux qui ne parlent que celui de la passion. Je ne sais ce que tout cela deviendra, mais j'en suis terriblement inquiet. »

Quelques jours après, il développe les raisons qui ont amené l’opinion à se déchainer contre son ancienne idole : :

« Du 5 mai 1792, lan IVe de la liberté.

« Je veux encore te parler de ce malheureux Robespierre dont la conduite ouvre enfin.les yeux à tous les vrais patriotes. Oh! qu'il m'en a coûté et qu'il m'en coûte encore pour le mésestimer! Robespierre n’est plus cet homme vertueux, modèle chéri de tous les amis de la liberté... L’orgueil effréné qui le domine, un amour-propre insatiable, un besoin indomptable de faire parler de lui, peut-être même celui de commander. voilà ce qui le perd, voilà ce qui ternit la grande réputation qu'il s'était justement acquise, mais dont il se rend indigne de jour en jour, quoique à force de flatter le peuple il l'ait aveuglé singulièrement et se soit fait un parti puissant. S'il persiste dans sa faute, il tombera tôt ou tard sous le glaive terrible de l’opinion publique.

« En effet, Robespierre est coupable. Si tu sentais combien cet aveu me déchire, combien cette idée m'assombrit et m'afflige ! Je l'avoue, je lui avais prodigué