Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

PENDANT LA RÉVOLUTION. 55

meneurs, C'est l'opulence de la capitale; dans tous les quartiers s'offrent à leurs yeux de superbes boutiques avec de riches assortiments dans tous les genres (Il n'y a pas un rez-de-chaussée, dit Edmond, qui ne soit occupé par un bijoutier, par un orfèvre ou par un café. » Mais une réflexion assez amère se Joint à cet enthousiasme : « Ici l'on paye tout, jusqu'à l'air qu'on respire, c'est un usage établi plus que partout ailleurs. L'argent fait ouvrir de grands yeux et est le grand mobile. » Cette observation est partagée par l'Allemand Schulz lorsqu'il écrit : « Tout s’achète à Paris; tout est achat ou vente, gain ou perte; aucune main ne se meut sans argent, aucun déplacement n'a lieu sans but, aucune mine gracieuse sans dessein... partout l’égoisme domine. »

Au premier dimanche de beau temps Edmond se rend aux Champs-Élysées qu'il n'a pas encore eu le temps de visiter. Il y trouve un monde prodigieux se p'omenant sous les longues allées d'arbres; des enfants en grand nombre y prennent leurs Joyeux ébats. Le seul inconvénient de cette belle promenade est le voisinage de la grande route de Versailles, qui y répand une poussière insupportable.

Sur la gauche se trouve le Cours-la-Reine, fermé par des grilles aux deux extrémités; il est séparé des Champs-Élysées par un fossé profond et c’est dans ce fossé que l'on peut voir les joueurs de balle et de cochonnet déployer leurs talents.