La correspondance de Marat

XXII INTRODUCTION

et les plus prophétiques de ce tumultueux génie. Leur éloquence nerveuse et solide fait regretter, à la fois pour la psychologie de Marat et pour l'histoire, que cette correspondante ne puisse guère être plus complète. On retrouvera sans doute encore quelques lettres oubliées, quelques documents momentanément enfouis dans des collections silencieuses ; mais la disparition de celles qui sont perdues pour jamais demeure d'autant plus sensible que, parmi ces lettres, il en est un certain nombre dont nous connaissons l'importance capitale. Telles sont, par exemple, les lettres de Marat aux ÉtatsGénéraux, celles à Barbaroux au temps de leur amiüé, et surtout cetle lettre mystérieuse que reçut Danton en septembre 1792, que Marat détruisit lui-même, et dont on ne connait ni le texte ni même l’objet précis’. Une correspondance complète de Marat serait, pour l’histoire de la Révolution, un document inestimable. Jamais peut-être, en effet, un homme n’a laissé palpiler son cœur avec une sincérité aussi passionnée, avec des accents aussi tragiques. C’est le destin même de la Révolution qui roule dans cet orage, dans ces cris, dans ces plaintes, où passe sans cesse l'ombre désespérée de Cassandre. Telles qu'elles sont, mutilées, déchirées, saignantes, ces

1. «.. Danton vint me trouver, me montra. une lettre que lui écrivait Marat; cette lettre était très insolente; les reproches étaient mélés aux injures ; il menaçait Danton de ses placards... » (Discours de Jérôme Petion sur l'accusation intentée contre Maximilien Robespierre, dans le Moniteur du 10 novembre 1792).