La France sous le Consulat

CONCLUSION 293

tenir son pouvoir du peuple souverain et en conservant les formes et les apparences de la République. Le Consulat à vie, institué en 1802, est un principat militaire et démocratique. Sa transformation en Empire héréditaire, outre qu’elle était dans la logique et la force des choses, est due à la persévérante habileté de Bonaparte qui à constamment marché vers ce but sans paraître le désirer ; à de nouvelles tentatives des royalistes qui, en menaçant une existence si précieuse, ont fait craindre, avec le retour des Bourbons et des émigrés, des représailles et des reprises funestes aux innombrables intérêts issus de la Révolution ; à l'exécution du duc d'Enghien qui a creusé un sanglant fossé entre le passé et le nouveau régime ; à la rupture de la paix d'Amiens, origine d’une nouvelle coalition qui remettait en question les résultats « des guerres de la liberté », et liait plus étroitement encore les destinées de la France à celle du général heureux dont l'épée magique lui avait une première fois donné le bienfait de la paix.

Pendant que s'établissait, sous les noms de Consulat et d'Empire, la dictature décennale, puis viagère, enfin héréditaire d'un chef d'armée, mandataire et représentant du peuple souverain, un double travail s’accomplissait, dans les institutions et dans la société, d’où est sortie la France contemporaine. Ce travail commencé et déterminé dans ses traits essentiels par l’ancienne monarchie, accéléré et poursuivi dans le même sens, en dépit des apparences superlicielles, par les assemblées de la Révolution, a été coordonné, achevé et fixé par Napoléon Bonaparte, Premier Consul et Empereur: l'édifice de la France nouvelle porte, suivant l'expression d’un de ses récents historiens‘, l’indestructible empreinte de cet architecte souverain qui, parmi les ruines et les matériaux à demi-préparés, a pris dans les institutions de l’ancien régime et dans celles de la Révolution ce qui

1. Taine ; les Origines de la France contemporaine ; Napoléon Bonaparte.