La France sous le Consulat
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s’adaptait à sa conception classique et romaine de l'Etat. La reconstruction de la France, commencée en 1800, n'a été terminée que vers 1811: mais, en 1804, à la fin du Consulat, la bâtisse est plus qu’à demi construite et entièrement finie dans ses maîtresses œuvres. On peut dès lors la caractériser et la juger. C’est une administration divisée en services distincts, centralisés à Paris dans les bureaux des ministères, et assurés en province par une hiérarchie de fonctionnaires répartis dans des cadres uniformes, et ne relevant que du gouvernement qui les nomme, les déplace, les révoque, autorise ou interdit les poursuites motivées par des faits relatifs à leurs fonctions. C’est une police renouvelée de l’ancien régime, qui ne se contente pas de maintenir l’ordre et la sécurité, mais qui étend sa surveillance soupconneuse et inquisitoriale aux moindres manifestations de la vie publique et privée. C’est une armée, détournée de plus en plus de son office naturel, qui est la défense de la patrie considérée comme un devoir rempli par des citoyens, pour devenir une caste de militaires de profession, attachés à leur chef plus encore qu'à leur pays par les honneurs et les profits de leur métier, incomparable instrument de conquête et de domination. C’est un ordre de chevalerie, à la fois eivil etmilitaire, démocratique et aristocratique, fait pour stimuler le zèle en chatouillant la vanité, et substituer l’ambition au devoir comme mobile des actes professionnels et civiques. C’est un code civil, consacrant dans le droit l'unité, l'égalité, la liberté privée, établies par la Révolution, mais sanctionnant aussi quelques-unes de ses plus dangereuses erreurs, désagrégeant et affaiblissant les associations spontanées et naturelles pour ne laisser subsister en face de l'Etat omnipotent que l'individu isolé, confiné dans le cercle égoïste de son existence éphémère. C’est un système d'instruction publique, jésuitique et militaire, mélange de couvent et de caserne, combiné pour produire