La première Commune révolutionnaire de Paris et les Assemblées nationales

322 LA PREMIÈRE COMMUNE RÉVOLUTIONNAIRE DE PARIS

Le projet de décret contre les provocateurs aux meurtres, proposé par Buzot le 27 octobre, vient en discussion le lendemain. Il était facile aux adversaires de le représenter comme une atteinte à la liberté sacrée de la presse. — C'était l'époque où Marat allait criant : « Il n°y à pas de crime d’opinion….. » Alors qu'il y avait dans les prisons de Paris beaucoup plus de gens qui y étaient détenus pour leurs opinions, que de prévenus pour crimes communs... Alors que Marat demandait 200 000 têtes, suspectes d’avoir une opinion contraire à la sienne... Et tout le parti de la Commune répétait avec une assurance plaisante : « Il n’y a pas de crime d’opinion », tout en supprimant les journaux et faisant arrêter les journalistes d'opinion contraire, y compris des républicains comme Girey-Dupré”.

Le projet de Buzot était bref; il consistait essentiellement en ces deux articles : « Quiconque aura, par écrits ou discours publiés, provoqué ou conseillé à dessein le meurtre. l'assassinat ou la sédition, sera puni de douze ans de fers, si l'acte conseillé ne s’en est pas suivi, — de mort, si l'acte s’en est suivi ». Ces débats du 30 octobre furent très superficiels. Le seul discours, un peu notable, fut celui de Lepelletier-SaintFargeau. Cet orateur combattit l'idée de faire une loi spéciale contre les provocateurs (que, d’ailleurs, il n'approuvait pas); il considérait comme suffisant un article inséré au Code pénal et qui disait : « Lorsqu'un crime aura été commis, quiconque laura conseillé. sera réputé complice et, par conséquent, puni des mêmes peines que celui qui aura effectué le crime. » En effet, cela aurait pu suffire, en y ajoutant ces

1. C’est à cette occasion que Danton poussa ce cri dont on lui a su tant de gré : « La liberté de la presse ou Ja mort! » — Allié politique de Marat, défenseur de la Commune, affilié aux Jacobins qui traitent la liberté de la presse comme nous savons, on pourrait se demander si c’est sa mort ou celle des autres que Danton réclame, à défaut de la liberté. En tout cas il a vu autour de lui, et très près de lui, supprimer cette liberté, sans en mourir, ni, je crois, sans en perdre un coup de dents. — Quant à Marat, je crois qu’on le définirait de la manière la plus exacte en disant de lui : Ge fut le plus gigantesque persécuteur d'opinions qu’on ait jamais vu.