La Presse libre selon les principes de 1789

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possible sans les lire; pour les lire, il faut les acheter, mais l'achat en est dispendieux, et peu de gens en ont les moyens; enfin, sur chaque question, les brochures se multiplieront, et peut-être, quoique soutenue par un vif intérêt, l’attention se fatignera, Ii faut done trouver un autre moyen pour instruire tous les Français, sans cesse, à peu de frais et sous une forme qui ne les fatigue pas. Ce moyen est un journal politique, ou une gazette. C’est l’unique moyen d'instruction pour une nation nombreuse, gênée dans ses facultés, peu accoutumée à lire, et qui cherche à sortir de l'ignorance et de l’esclavage. »

L'utilité matérielle de la feuille périodique étant ainsi démontrée, Brissot répète un mot qu’il a souvent entendu prononcer à Londres, lorsqu'il s’y occupait de fonder une Confédération universelle des philosophes, le mot fameux du docteur Jebb, dont il fera désormais sa devise :

« Une gazette libre est une sentinelle qui veille sans cesse pour le peuple. »

Si, démontre-t-il avec sa loquacité ordinaire, l’Irlande n’est pas restée affaissée sous la tyrannie du parlement anglais, c’est à la liberté de la presse qu’elle le doit. Sans les journaux des deux mondes la révolution d'Amérique ne se serait jamais faite.