La Princesse de Beira et la police autrichienne

2 COMMANDANT WEIL

Charles-Albert n’avait pas hésité une seule minute à accueillir favora‘biement une demande qui lui permettait de manifester une fois de plus les sympathies qu’il n'avait cessé d’avoir pour cette cause. Sur l’heure même, il avait fait répondre à la Princesse qu’il s’estimerait heureux de la recevoir dans ses Etats.

La nécessité d'assurer la translation de la partie du Gouvernement Espagnol, qui se trouvait auprès d’elle et de l’'Evêque de Leon (1), ainsi que l'expédition et le transport sans risques de ses papiers personnels d’une part, l’état de sa santé, de l’autre, obligèrent toutefois la Princesse à ajourner son voyage. Arrivée à Turin le 20 juillet 1838, elle habita d’abord le château de Stupinigi avant d’aller s'installer à la « Vigna della Regina », que le Roi avait mis à sa disposition. Mais le choléra ayant éclaté peu après en Piémont, la Princesse partit de Turin vers la fin du mois d’août et passa en Autriche avec ses neveux et futurs beaux-fils.

Une résidence ausssi calme, aussi tranquille que Salzbourg n'était guère faite pour convenir au tempérament ardent, à l'esprit d’entreprise, au besoin d’agir de la Princesse.Elle ne pouvait manquer de s’y trouver trop isolée, trop loin des lieux où se jouait le sort de sa couronne,la destinée de sa famille. Des considérations d’ordre essentiellement privé la poussaient d’autre part à profiter de la situation géographique de Salzbourg pour essayer de quitter à l'insu de la Cour de Vienne l'asile qu'on lui avait si généreusement offert.

La mise en scène de cette évasion et le caractère exceptionnel de ce que M.de Sainte-Aulaire appelle «une anecdote» avaient tellementifrappé, cet homme d’Etat que dès son retour à Vienne, il avaiteru devoir en faire l’objet de la dépêche qu’il adressait au Département le 27 octobre 1838.

Mais avant de faire passer sous les yeux du lecteur ce rapportde notre Ambassadeur, il m'a paru indispensable d’ouvrir une parenthèse, qui me force à revenir en arrière de près d’un an. J’ai cru en effet devoir emprunter, tant aux dépêches du mois de novembre 1837 de notre Chargé d'Affaires auprès du Saint-Siège qu’à une note du Département,partie de

ra d’abord dans les Annuaires comme Colonel à la suite du 18° régiment d’infanterie, fut même promu Major-Général en 1847. On sait que ce Prince, plus connu sous le titre de Comte de Montemolin, et auquel son père, le premier don Carlos (Charles V pour ses partisans, puis comte de Molina) céda, en 1845, ses droits à la couronne, mourut en 1861 à Trieste, On n'ignore pas non plus que son frère, don Juan (né en 1822 mort à Brighton en 1887) renonca dans les derniers mois de l’année 1868 à ses droïts à la couronne en faveur de son fils aîné, don Carlos (Charles VIL), Ie duc de Madrid, mort en 1909 à Varese et don le fils unique, don Jaime, est depuis ce moment le chef des Carlistes.

(1), Don Gioacchino Abarca y Blanque (1780-1844), depuis 1825 évêque de Leon, devint à la mort de Ferdinand VII un des chefs les plus actifs du parti Carliste. Arrêté en 1836 à Bordeaux où il était venu pour faire des achats d’armes, conduit à la frontière d'Allemagne, il ne resta que peu de temps à Francfort et retourna à Londres où il réussit à obtenir des subsides des « Tories » et devint l’un des quatre membres du Cabinet formé par don Carlos qui lui confia le portefeuille de la Justice. Son caractère cassant ne lui permit pas de vivre en bonne intelligence avec les autres chefs du parti. Ne pouvant rentrer en Espagne, expulsé de France, il vint s'établir en Italie et se retira au couvent des Camaldules de l’'Eremo di Lanzo, près de Turin, où il finit ses jours.