La représentation des aristocraties dans les chambres hautes en France : 1789-1815
336 LA REPRÉSÉNTATION DES ARISTOCRATIES
mais de fait, elle se considérait plus que jamais comme une race privilégiée : toute effusion ou amalgame avec les chefs de la révolution était difficile. La création de nouveaux titres fit disparaître entièrement ces difficultés. Il n’y eut aucune ancienne famille qui ne s’alliät volontiers avec lesnouveaux ducs. En effet, les Noailles, les Colbert, les Louvois, les Fleury, étaient de nouvelles maisons. Dès leur origine, les plus anciennes maisons de France avaient brigué leur alliance. C’est ainsi que les familles de la Révolution se trouvaient consolidées et l’ancienne et la nouvelle France réunies. Ce fut à dessein que le premier titre que Napoléon donna, fut au maréchal Lefevre. Ce maréchal avait été simple soldat et tout le monde dans Paris l'avait connu sergent aux gardes françaises.
« Son projet était de reconstituer la vieille noblesse de France. Toute famille qui comptait dans ses ancêtres un cardinal, un grand officier de la couronne, un maréchal de France, un ministre, ete... eût été pour cela seule apte à solliciter au conseil du sceau le titre de Duc : toute famille qui aurait eu un archevêque, un ambassadeur, un premier président, un lieutenantgénéral ou un vice-amiral, le titre de comte ; toute famille qui aurait eu un évêque, un maréchal de camp, un contre-amiral, un conseiller d’État ou un président à mortier, le titre de baron. Ces titres n'auraient été octroyés qu’à la charge par les impé trants d'établir pour les ducs un majorat de cent mille francs de revenu, pour les comtes de trente mille francs, pour les barons de dix mille. Celte règle qui régissait le passé et le présent, devait régir l’avenir. De là sortait une noblesse historique qui liait le passé, le présent et l'avenir, et qui était constituée non sur la distinction du sang, ce qui est une noblesse imaginaire, puisqu'il n’y a qu'une seule race d'hommes, mais sur les services rendus à l'État. De même que le fils d'un cultivateur pouvait se dire, je serai un jour cardinal, maréchal de