La représentation des aristocraties dans les chambres hautes en France : 1789-1815
82 LA REPRÉSENTATION DES ARISTOCRATIES
tout à coup rapprochée de la haute bourgeoisie, réalisant subitement une gentry française, quand tout son effort avait élé de se hausser jusqu'à la caste de la noblesse de race ? Quelques individus ne donnent-ils pas l'illusion d’un ordre ? Des titres anciens ne provoquent-ils pas le mirage d'une aristocratie nationale ? Sufit-il à une Chambre représentative d'offrir le spectacle de quelques hommes d’État probables quand c’est au niveau des plus basses intelligences que descend toute assemblée, quand, surtout, en face d’un pouvoir sorti de tout le peuple, fort de toutes ses énergies, de toutes ses haines, de tous ses espoirs, elle ne représente rien hors d'elle-même, qu'une gloire sceptique qui s'éteint ? Au rationalisme égalitaire de Rousseau sied-il d'opposer victorieusement l'école historique des disciples de Montesquieu ? Et le rationalisme n'est-il pas précisément si triomphant qu'il pénètre là même où on en cherche l’antithèse, puisque de pactes, d'usages, de précédents mal connus, arbitrairement interprétés, on fait une constitution idéale, un prototype affranchi de toutes les contingences physiologiques, locales, historiques ?
Or, dès leur point de départ, les monarchies anglaise et française se différencient. Elles sont, dans le même temps, soumises au régime féodal. Mais les races, les situations géographiques, les circonstances ÿ déterminent des caractères distincts. La féodalité anglaise, écrit M. Boutmy dans un livre dont nous consignerons ici