La Serbie
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Ilme Année. — No 9
RÉDACTION et ADMINISTRATION 69, rue du XXXI Décembre - Genève Téléphone 14.05
JOURN
Prix du Numéro : 40 Centimes
AL POLITIQUE HEBDOMADAIFR
Paraissant tous les Samedis
Rédacteur en chef : Dr Lazare MARCOVITCH, professeur à l'Université de Belgrade
LE BILAN D'UNE RÉVOLUTION
C'est avec une joie sincère que nous avions salué, il y a une année, la révolu-
tion russe dont le brillant début promettait |
un avenir meilleur aux peuples du vaste empire. On espérait avec raison, que cet événement rapprocherait encore la Russie des nations libérales d'occident et que la Russie nouvelle, révolutionnaire et démocratique, viendrait combattre avec plus d’acharnement encore les plans impérialistes de l'Allemagne, qui se dessinaient chaque jour avec plus de clarté. Nos illusions ne furent pas de longue durée. Le pouvoir en Russie ayant passé, grâce à la faiblesse de certains chefs populaires, aux organisations illégales et irresponsables des Soviets, aux mains de certains aventuriers d’origine douteuse, la révolution a tourné contre les principes mêmes dont elle était issue : ceux de la liberté et de la démocratie, pour se fondre en un internationalisme vague et incolore.
Au lieu de tirer le peuple russe de l'ignorance où il croupissait depuis des siècles, de l’organiser et de l’éduquer, les prétendus démocrates entreprirent de flatter ses instincts les plus vils afin de pouvoir l’exploiter à leur aise. Ils oubliaient que si l’on a fait au début crédit à la Révolution, c'était à la condition que ses chefs sauvent le pays de la corruption, de la misère et de l'esclavage, où il se trouvait par la faute des gouvernements précédents, pour en faire un état libre et civilisé. Or, la révolution en changeant la forme du régime ne changea guère l'esprit ni les mœurs du pays. Au lieu d’un maître, on en compta des milliers. Les nouveaux souverains se nommaient bolchevikis et se considéraient comme les apôtres de la nouvelle félicité communiste en Europe. Ces prétendus sauveurs de la Russie ne se génèrent pas d’accepter l'argent ennemi pour faire de la propa-
gande maximaliste dont le but unique était la désorganisation complète du pays. L’Allemagne, bien entendu, soutenait de toutes ses forces le mouvement tendant à la dissolution du grand état Slave. Tout en déelarant sympathiser avec la Russie nouvelle, elle ne cesse de creuser l'abime où celle-ci devait tomber un jour.
Elle s’ingérait subrepticement dans ses affaires intérieures, favorisant les dissensions entre les divers partis de la nouvelle République comme entre les différents peuples dont elle se servait pour ses propres fins.
Chose curieuse entre toutes, la politique ultra « démocratique » des Bolchevikis les rapprochait de plus en plus de l'Allemagne anti-démocratique et militaire, tant il est vrai que les extrêmes se touchent en politique comme ailleurs !
Les Younkers prussiens trouvèrent donc dans les anarchistes russes leurs alliés naturels. Il s’agissait seulement de savoir pour combien de temps. Car à un certain moment, il paraissait que les abus des maximalistes amèneraient la dictature militaire, Mais le mouvement de Korniloff échoua piteusement par le manque de décision et de fermeté chez Kerentki. Le peuple russe une fois plongé dans l'anarchie ne se ressaisit plus. Le coup de Korniloff raté, Kerenski lui-même disparut dans la tourmente et le gâchis devint général.
Après la chute de Kerenski ce fut à qui promettrait, parmi les démagogues corrom-
pus, le plus de bonheur aux peuples de Russie.
En créant des Soviets des ouvriers et des soldats, on croyait avoir trouvé le secret de gouverner le monde, et l’on se hâtait d'établir l'anarchie partout au moyen de Soviets locaux, organisations idéales qui devaient transformer du jour au lendemain la terre en paradis.
On désorganisa l’armée sous prétexte de
la démocratiser et on démoralisa les soldats,
en instituant des comités pour discuter les ordres des supérieurs. La dissolution de la Constituante en laquelle les esprits avancés voyaient l’unique chance de salut pour la République mit fin à la comédie jouée par les Bolchevikis qui cette fois jetèrent le masque. Gette dissolution une fois ordonnée, il ne resta plus une ombre de légalité de pouvoir aux Soviets.
La suppression de la propriété, l’abolition des lois et des tribunaux, la confiscation des fonds et la répudiation des dettes publiques fut la suite logique de cet état de choses.
La politique extérieure des maximalistes ne fut pas moins néfaste. Au lieu de chercher comment chasser l’ennemi qui occupait une grande partie du pays, les maximalistes se mirent à réclamer la paix à
tout prix, sans songer un instant qu'une
telle paix ne serait plus une paix mais une capitulation. Sans tenir compte des engagements antérieurs de la Russie, de sa dignité, de son honneur, ils commirent la plus abominable des trahisons en signant l'armistice du mois de décembre. On vit les hommes qui se targuaient d’être les représentants d’une morale sociale supérieure, ne pas tenir aucun compte de la morale courante. S’estimant plus fins que les autres, et jugeant les autres pays selon le leur, ils espéraient, par cette manœuvre et au moyen de formules creuses et mensongères, provoquer un mouvement révolutionnaire dans le monde entier. Or aucun pays ne suivit leur exemple, le spectacle de leur désordre n’eut d’autre eflet que de fortifier le régime militariste chez leurs
ennemis. Dans le tourbillon des événements :
ils tournèrent comme une girouette et changèrent sans cesse d’attitude. Ils em-
brassèrent tour à tour les formules : le droit
des peuples de disposer de leur sort; la paix sans annexion et sans indemnité, etc. Mais ce ne furent là que des étiquettes qui devaient rendre leur régime sympathi-
que à l'étranger et couvrir la honte de
leurs actions.
Par la paix de Brest et la capitulation du 21 Février 1918, ils consommèrent leur honte. Car cette fois-ci ils trahirent leur propre peuple après l'avoir désarmé complètement en lui promettant une paix démocratique et universelle. En refusant d'avouer leur impuissance et leurs déboires, ils livraient ainsi la Russie sans force et sans défense à la merci de ses adversaires. La formule : ni guerre ni paix, inventée par Trotzki pour couvrir l’échec complet de leur action pacifiste, ne put tromper personne. Elle ne contenta pas non plus leur adversaire qui crut le moment opportun pour opérer le partage de la Russie. De même qu'il y a un siècle elle s’entendit avec la Russie pour démembrer la Pologne, l'Allemagne s’entendit cette fois-ci avec l'Ukraine pour démembrer la Russie. Aïnsi
les commissaires du peuple qui trahirent la Russie et ses alliés furent trahis à leur tour. Les représentants de la Rada Ukrainienne donnèrent aussi dans le piège allemand.
L'indépendance que l'Allemagne reconnait pour le moment à l'Ukraine n'est qu'une fiction et la nouvelle République n'aura pas plus de chance de durer que l'Etat de Pologne, que l’on créa il y a deux ans pour le dépouiller aujourd’hui de la plus grande partie de ses territoires au profit d’une Ukraine improvisée.
La prise de déricho -
L'armée du général Allenby marque un nouveau succès par la prise de Jéricho qui vient d’être occupé malgré la résistance énergique, les difficultés du terrain ei du climat. L'assaut .décisif a été effectué le 20 février. « Les troupes britanniques, dit le communiqué, luitant avec une valeur irrésistible, délogèrent l'ennemi d’une série de crêtes rocheuses, sous une pluie torrentielle. La cavalerie eut une tâche particulièrement difficile, ne pouvant avancer en cestains endroits qu'à la file indienne ».
La défaite turque n’assure pas seulement l'accès du Jourdain et de la Mer Morte, mais prête une aide sérieuse aux opérations
Genève, Samedi 2 Mars 1918
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Les soi-disant représentants de l'Ukraine qui viennent de signer la paix semblent oublier que c’est l’Entente qui combat pour l'indépendance des petits peuples et qu’en la trahissant, c’est en réalité leur propre cause qu’ils trahissent. Cependant le jour semble prochain où le peuple russe se réveillera enfin pour demander compte à ceux qui l’on perdu. Qu’avez vous fait de vos frères d'armes, de vos alliés et de vos principes demandera-t-1l alors aux commissaires du peuple de Pétrograde et de Kief?
En attendant l'ennemi avance et la Russie désarmée, meurtrie, humiliée, semble secouée d’un frisson de mort.
M. D. MARINCOVITCH.
La perte de Trébizonde
| du roi du Hedjaz qui avance vers le nord. * À %
Les Turcs viennent de reprendre la ville arménienne de Trébizonde, que les maximalistes, ces libérateurs des peuples, laissent retomber sous le joug ottoman. Au fond les Arméniens sont-ils vraiment tant à
plaindre à cause du changement de mattres ? Entre le régime des anarchistes russes et celui des Jeunes-Turcs, la différence serait-elle si grande? Nous ne le croyons pas.-A notre avis-les deux régimes se valent. C’est en effet comme si l’on comparait la peste au choléra selon le mot de l'immortel Sienkievitch. M.
L'Autriche-Hongrie peut-elle exister ?
L’Autriche-Hongrie est à un tournant. Elle se débat dans une situation d’où elle ne pourra pas sortir telle qu’elle est actuellement. Les peuples conscients die leurs droits agissent sur elle comme un corrosif dissolvant, d'où un tiraillement constant qu’il n’est plus possible de cacher.
La question se pose de savoir si la Monarchie des Habsbourg pourra empêcher l’éclosion complète des tendances séparatistes des peuples et par quels moyens elle pourra satisfaire aux demandes de ses peuples. D’autre part, on doit 6e demander si les millions d'habitants dont se composent les peuples mécontents sauront organiser leurs énergies nationales pour les opposer avec succès à leurs oppresseurs.
La politique menée par les GermanoMagyars, peuples détenteurs du pouvoir total dans la double Monarchie, à provoqué depuis des siècles um mécontentement géméral et a fomenté l’idée de la séparation des peuples subjugués. Les réformes et d'innombrables promesses me pouvaient aplanir les différends qui existaient entre les maîtres et les opprimés. Les autonomies tant de fois promises n’entrent plus dans les arrangements possibles, car l’autonomie, quelle que soit Sa forme, pourrait être abolie dès que le danger extérieur serait passé, comme cela à été le cas déjà tant de fois dans l’histoire de la Monarchie. Une Fédération autrichienne quelconque ne serait pas non plus de nature à satisfaire le désir nettement exprimé des peuples de vivre en peuples absolument libres.
En conséquence, la Monarchie, c’est-àdire les maîtres germano-magyars, saveni très bien qu’un arrangement constitution nel, une réconciliation intérieure entre les maîtres et les opprimés, est impossible. Il ne leur reste donc que l'emploi des moyens coercitifs pour amener les peuples À la raison Cependant, pour que le
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règne des baïonnettes recommence en Autriche, il manque quelque chose. Il manque cette discipline de fer, cette organisation qui au début de la guerre a pu rendre les maîtres capables de punir les peuples suspects d’ume façon tyranmique. Actuellement, il y a quelque chose de changé. L’épuisement physique et moral causé par quatre années de guerre à bouleversé jusqu’au fond l'édifice artificiel de la Monarchie. Les forces centrifuges .des peuples opprimés sont réveillées. Un immense abîme sépare aujourd'hui les maîtres des opprimés. La volonté de ces derniers se dresse unanime et guette le moment de se soustraire totalement à l’étreinte du maître actuel.
En. effet, l’organisation des forces natiomales, surtout celle des Yougoslaves et des Tchèques, se poursuit avec ‘une énergie fiévreuse. Dans les pays yougoslaves le mouvement pour l’union de tous les Serbes, Croates et Slovènes, y compris ceux de la Serbie et du Monténégro, prend des proportions toute révolutionnaires. Un journal austrophile de Croatie constate avec tristesse l’éclosion du sentiment national en disant ceci:
« Le mouvement yougoslave s’est étendu partout avec une telle force qu'on ne peut plus rien voir ni rien entendre en dehors du yougoslavisme et encore du yougoslavisme. La vague yougoslave monte comme la marée et emporte devant elle tout ce qu’elle rencontre. »
En vérité, le souffle national yougoslave ébranle les hommes jusqu'ici inactifs et même hostiles à cette idée et se fraye un chemin jusqu'aux milieux où la politique n’était pas familière. Depuis les prétres catholiques jusqu'aux socialistes internationaux, toute la masse du peuple se range dans un seul camp, celui de lindépendance nationale, libre de toute tutelle, même de celle des Habsbourg.
En Slovénie 442 commrunes, 82.986 femmes, 15 départements et 85 sociétés se