La Serbie
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RÉDACTION et ADMINISTRATION 6, rue du XXXI Décembre - Genève
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Prix du Numéro:
JOURNAL POLITIQUE H
LL : 10 Centimes
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Paraissant tous les Samedis per 4
Rédacteur en chef : Dr Lazare MARCOVITCH,
Ibrofesseur à l'Université de Belgrade
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Le message de Vienne
La campagne de paix austro-allemande bat son plein depuis que les armées alliées en France commencent à imposer leur volonté à l'ennemi.
A chaque victoire alliée, les Austro-Allemands répondent par un discours approprié et ce jeu continuera à se répéter indéfiniment, à ce qu’il semble, les chancelleries de Berlin et de Vienne n'étant en somme qu’au début de leur offensive pacifiste. En Autriche-Hongrie, le comte Burian a prononcé un grand discours devant les représentants de la prèsse allemande dans !lequel il ne demandait aux Alliés que de lui fournir l’occasion de discuter d’une façon tranquille. « Dans toutes les questions d’humanité et de justice, assurait M. Burian, qui règleront les rapports futurs des peuples, les Alliés ne rencontreront aucune opposition de notre part ». Le comte Czernin est venu appuyer son successeur par un article paru dans la « Neue Freie Presse » en faveur de l'arbitrage obligatoire. Pour que les Allemands et Magyars ne s’effrayent pas de cette prose pacifiste, le ministre-président autrichien, M. Hussarek, a tenu de son côté à préciser, devant les mêmes représentants de la presse allemande, que tous les propos sur la transformation de l'AutricheHongrie en une fédération sont des inventions malveillantes. « Toute évolution éventuelle de la Monarchie, a déclaré, M. Hussarek, trouve sa limite naturelle à ces deux axiomes: le respect devant les droits et la constitution de la Hongrie, et la conservation du caractère unitaire de notre Etat. Même une Autriche rajeunie dôit rester une et indivisible. En ma qualité de chef du gouvernement autrichien, je tiens à souligner ce caractère essentiel de notre Etat, qui n'est pas toujours visible, mais qui n'en forme pas moins la base de notre histoire et de notre politique. Je le fais d'autant plus en ce moment que l’Autrichianisme et le Germanisme se trouvent étroitement liés et qu'ils resteront aussi à l’avenir en relations très intimes | »
En Allemagne, c’est le même ton. Le vicechancelier de l'Empire, M. de Payer a prononcé à Stuttgart un grand discours qui reflète les dernières espérances de nos ennemis. En effet, M. de Payer plaide pour une paix sur la base du statu quo territorial, pour tous les pays, sauf pour la Russie. Remarquons en passant que le discours de M..de Payer constitue sur ce point-là un avertissement dont les Bulgares n'ont pas lieu d’être enchantés. Pour la Russie cependant M. de Payer propose de laisser les choses telles qu'elles sont et de confier à l'AIlemagne le soin d’ « organiser» et de \(relever » les peuples limitrophes. L'Allemagne
renoncerait ainsi à ses plans occidentaux et se.
contenterait du morceau russe. Elle tiendrait dans ses mains toutes les voies d’Asie-Mineure et d'Asie centrale et créerait un vaste Empire continental, le plus formidable que l’on puisse imaginer. La formule lancée déjà l'année dernière d’une « paix de compromis » En Occident et d'une « paix dictée » à l'Orient serait donc définitivement acceptée par l'Allemagne. La base de la paix, proposée par M. de Payer, n’est en somme qu’une retraite politique, provoquée par le refoulement des armées allemandes sur la ligne Hindenbourg. Pour donner plus de poids à cette formule en apparence conciliante, le Kaiser a jugé nécessaire de paraître sur la scène et de donner l'assurance formelle que l'Allemagne est invincible. A défaut d'arguments plus probants, le Kaiser a cité l'écrasement de la Serbie et du Monténégro, ajoutant qu'il ne reste plus aux Allemands qu’à
vaincre en France.! Evidemment, Quant aux Serbes, ils viennent de demontrer par l'attaque en Macédoine comment ils entendent riposter aux propos méprisants de l’empereur allemand.
Dans de telles circonstances, l'invitation officielle du gouvernement viennois à causer « confidentiellement», ne saurait être prise nulle part au sérieux. Le ministre austro-hongrois a basé sa note sur les déclarations déjà oubliées de Lloyd Georges, Wilson et Balfour, d'il y a six mois. Îl aurait dû rappeler la décision de Versailles, le discours de Balfour à l’inauguration du Comité National serbe à Londres, la déclaration de Lansing et la reconnaissance de l'indépendance tchéco-slovaque. Mais la note de M. Burian fournit aux Alliés une occasion admirable de dire ce qu'ils pensent de la Monarchie des Habsbourg. C’est aussi la meilleure occasion de compléter la déclaration concernant les Tchéco-Slovaques par la reconnaissance de l'Etat serbo-croate et slovène, dans le sens du manifeste de Corfou, et d'arrêter les Polonais dans leur politique quelquefois par trop activiste.
L. M.
La veix du canon serbe
De nouveau, on. entend tonner le canon serbe, Les Bulgares comme les Turcs et comme les Austro-Allemands ont appris à leur dépens à discerner son écho et à connaître ses effets puisque ils l’entendirent tonner successivement à Bregalnitza, à Koumanovo, à Roudnik et sur les crêtes de Kaïmaktchalan. Partout, il fit taire les canons ennemis et se fraya le chemin vers la victoire. De même aujourd’hui les coups de tonnerre retentissant sur le front de Salonique, de si loin qu’ils viennent, n’annoncent pas moins des brillantes victoires. Les noms de Vetrenik, de Dobro Polié de Sokob et de Koziak viennent s'ajouter aux autres noms célèbres qui diront aux générations futureslesexploitsinnombrables d'une armée sans égale dont les hauts faits font pâlir les épopées antiques. Soutenus par leurs camarades français, les Serbes viennent de prendre aux Bulgares les plus importantes positions stratégiques qui leur ouvrent lechemin au cœur de la Macédoine serbe vers Prilep et Skopié. Sans compter l'effet moral que produira cette victoire, sur la population de la Serbie envahie; c’est à un succès militaire de premier ordre.
L'écho des nouvelles victoires serbes sera la meilleure réponse aux paroles insolites de l’empereur Guillaume, prononcées l’autre jour à l’adresse de la Serbie.
L'empereur allemand prétendait alors que la Serbie etait mise hors de combat en oubliant que le compte avec la Serbie ne sera pas réglé définitivement tant qu'il existe un soldat serbe, le dernier soldat étant animé de la même foi patriotique et de la même ardeur belliqueuse que ses plus
grands chefs et ses meilleurs fils.
L'empereur Guillaume saura-t-il comprendre enfin cette leçon et se convaincrat-il qu’il a parlé un jour trop tôt ? M.
De Berne, 18 :
Des divisions allemandes viennent en hâte au secours des Bulgares batius. Malgré celte intervention, les Germano-Bulgares ont élé mis en fuite par l’énergique et irrésistible vaillance des Franco-Serbes. Le nombre de canons capturés est de 50.
2 Î pe è
l'empereur Guillaume descendit l’autre jour dans les caves des usines Krupp pour y prêeher le ne nr haut Cet ag mehr, chuÿe d'impressiennant et de symbolique. Ce n’est plus l'ennemi, c’est le doute et l'angoisse de son propre peuple qu’il s’agit de vaincre. Aussi, c’est pour la première fois que le souverain allemand, le chef des hobereaux pr'ussiens, cherche le contact avec les prolétaires de l’empire. Tant que les bulletins de l'état-major annonçaient des victoires, dans les télégrammes lesdiscours et les manifestes impériaux, il ne fu fait mention que de l'empire, de l'Empereur, de Kronprins et de la maison impériale. C'est à peine si le nom de Hindenbourg y trouvait quelque place. Quant au Michel allemand, on né lui laissa que la satisfaction et l'insigne honneür de se faire tuer pour la plus grande gloire de empire et des Hohensollern.
Aujourd’hui tout paraîtchangé. Les bulletins
k glaive dans une main, la Bible dans l'autre,
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Les agissements des Magyars dans celte gubrre (6ônt toujours été des plus intéressabls, Comme un baromètre, ils sont sensibles à Lous les changements de la fortune de la guerre, Dès que les chances deë Impériaux tombent, les Magyars poussbron-avant leurs pacifisktes;-dont-les-discours sont scrupuleusement envoyés aux pays neutres par les soins de lPAgence télégraphique officielle. La duplicité diplomatique Sy manifeste avec clarté. D'un côté, ils tendent à s'adapter sérieusement aux idées démocraliques, tout en. restant au fond ce qu'ils ont été toujours : lapprésseurs lyranniques des peuples, ‘et, par conséquent, ennemis les plus prononcés des idées embrassées par les Alliés.
Le comte Michel Karolyi jouit encore aujourd’hui dun certain crédit auprès de nos grands alliés, Le langage pseudo-démocratique que ce noble comte n’omet jamais de répéter a pu trouver.des auditeurs erédules, quoique le sens de ce langage fût toujours trop transparent. Un examen attentif pourrait révéler facilement que derrière les paroles démocratiques se blottit un impérialisme de meilleur aloï, qui ne diffère de l’impérialisme allemand que par son domaine restreint,
L’impérialisme magyar, quoique très violent, n’est pourtant pas allé aussi loir pour sortir de ses petits cadres; il n’est pas visible sur les grandes routes mondiales, mais par contre, il.est d'autant plus ressenti par les petits peuples voisins. La paix avec la Roumanie en est un témoignage éloquent, |
Le comte Karolyi a écrit il y a quelques
jours une lettre buverte à ses électeurs de Czegled où il s’est érigé en apôtre dg la «paix de conciliation ». Affirmant que la vicloire est impossible, tant pour les Allemands que pour les Alliés, il propose de prendre pour base de réconciliation le programme de paix de Wilson et continue ainsi: « Cette déclaralion ne signifierait pas encore qu’on doive souscrire à la lettre à toutes les paroles de Wilson et 6e soumettre à ses suggestions sans discuission, Wilson luismême ne voudrait pas que le droit des peuples de disposer d'eux-mêmes soit réalisé en Hongrie dans sa pureté doctrinaire sans égard aux droits historiques. » “1
Quand il s’agit d'appliquer le principe dauta-disposition des peuples en Hongrie, on est doctrinaire, naturellement. Fritz Adler, le meurtrier de Stürgkh, caractévisait bien dans sa défense la mentalité austro-hongroise en S'écriant: « Chez nous, en Autriche, on s'est loujours enthousiasmé pour la liberté et la révolution — à l'étranger! » Pourvu qu'on ne touche
g comte Harolyi et les Vougoslaves
Un discours impérial
annonçant des revers et des reculades, il faut partager la peine. Il faut que tout le peuple prenne part aux responsabilités et approuve dès -à présent une politique qui conduit le pays à la rare eerlaine. C’est polfquot il Jaut que le monde dise «oui ». Le vieux Bieu, proteëleur officiel des Allemands, celui qui les a aidés jusqu'ici à gagner les batailles, devra marcher aussi. Il ne trahira pas maintenant le « peuple élu ». N'est-ce pas grâce à lui, à Krupp et à Ferdinand de Kobourg que la puissance du Monténégro se trouve: déjà brisée.
Après quatre ans dé guerre, il ne reste plus que le front d'Occident qui bouge. Une baga: telle ! L'Allemagne ne combat plus que le génie de Foch, « la misérable petite armée anglaise » et les quelques millions de soldats américains.
La guerre est virtuellement gagnée pour les Allemands. C’est ce que l'empereur Guillaume grâce à sa modestie innée a omis de dire à son peuple. M.-D. M.
pas aux frontières de la Hongrie, le comte Karolyi acceptera volontiers la paix Wil- : san. IL est très aisé d’être démocrate et libéral pour les autres, c’est pourquoi Les Magyars sont compatissants jusqu'aux larmes, pour la liberté des ÆEsthoniens,. Li-
-thuaniens-et-Fintandaiss-mais.-dès--qure: Les
peuples qu'ils oppriment en Hongrie sont en question, ils deviennent vigoureux kel agitent leurs ‘innombrables droits hüistoriques. Nous en avons une belle preuve venant de l'entourage immédiat du comte Karolyi.
L’organe du comité Karolyi « Magyarorszag » publiait il y a quelques jours un article. de fond sur les questions yougoslave et polonaise, En parlant de la Por logne, Pauteur Buza Barna, un ami intime de Karolyi, proteste contre les idées de partage et des compensations tout en plaidant pour la solution austro-polonaise. LL dit « que ‘cela ne concorde pas avec les idées de la paix blanche et du droit d'auto: disposition des peuples ». Mais .immédiatement après celle expression loyale, à vue, il précise sa pensée, qui, par sou, hypocrisie, peut être classée parmi Les meilleures expressions de l’âme miensongère magyare : {
« À nimporte quelle époque que soil réglée la question de la Bosnie, elle na pourra pourtant avoir qu'une seule solution définitive et juste: La Bosnie doit être unie à la Hongrie. Et cela non ‘pas comme compensalion pour lagrandissement de l’Autriche, mais commije une s0lution naturelle qui découle de la ‘silualion géographique et du développement-hisborique. De même pour la Dalmatie: de par Je droit, elle appartient déjà à la Hongrie, ce qui ne peul être l'objet d'aucun doute. Et après la guerre nous devons oblenir au moins que l’état juridique concorde avec lélat réel. Cependant ni la Bosnie, ni la Dalmatie ne doivent être unies à la Croatie, car nous ne devons pas construire nous-mêmes le grand Etat yougoslave, que nous craignons. au: jourd’hui. IL ne serait ni juste, ni bon, si les Magyars voulaïent unir dans un (Etat la Bosnie, la Dalmatie et la Croatie, Qu'ils restent distincts, Ces Etats jouiraient de grandes autonomies, mais ils ne devraicnt pas envoyer leurs députés au Parlement de Budapest, IL ne faudrait pas qu’un groupe, yougoslave parlementaire soit constitué. Des délégations. spéciales. de chaque pays devraient régler les affaires communes. Ge serait peut-être la meilleure solution de la question yougoslave, : solution qui répondait au droit des peuples, ».
Après s'être déclaré partisan des idées