Le drame serbe : octobre 1915 - mars 1916

LUTTE CONTRE LES ALLEMANDS INVISIBLES 5

de tout détruire. Ce sera le désert. Je regarde ce paysage, et il m'impressionne autant que la vue d’un condamné à mort. Deux kilomètres au Nord de Palanka, le train s’est arrêté. Une automobile nous attend pour nous mener sur les positions où la division de Schoumadia tentera d'arrêter l'adversaire. Au quartier général serbe, on m'avait dit avec un accent désespéré : « Allez voir! » Je vais voir.

Et tout d’abord, je ne vois qu'une campagne sereine, silencieuse, sur laquelle le soir tombe doucement. Un peloton de cavalerie en réserve derrière un bosquet, une ambulance campée dans une ferme au bord du chemin, un gendarme qui passe au galop, sont les seules images qui animent pour le moment le paysage. Dans cette plaine, sur ces collines, deux armées sont pourtant face à face. L'armée serbe se laisse à peine deviner. L'armée allemande, elle, reste totalement irrépérable. Et pourtant elle est là, tapie dans ce décor de grisaille. Elle est là. On en connaît le nombre, la