Le drapeau du 27e régiment d'infanterie

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prussienne s’avance en bataille pour s'emparer du village, et elle s'arrête à portée de fusil. Ses décharges bien ajustées nous font souffrir cruellement, et pour l’appuyer en attendant l’arrivée des réserves du général Ruchel, qui accourt de Weimar, le prince de Hohenlohe fait couvrir d’obus le village et le rend intenable. Vains efforts! Augereau vient enfin d'atteindre l’aile droite des Prussiens, qu'il refoule sur leur centre, et c’est le canon de Soult qu’on entend sur leur flanc gauche! En même temps, la grosse cavalerie de Murat débouche sur le plateau, Les chevaux blancs d’écume et tirant la langue, et les deux divisions de Ney, qui ont parcouru plus de 15 lieues (63kilom.) sans s'arrêter, au milieu de fatigues inouïes (L), et qui sont allées passer la Saale à Dornburg, paraissent enfin sur notre droite, le 27° de Ligne en tête, prenant position auprès de Soult. Alors Napoléon fait avancer toutes ses réserves, qui donnent à la première ligne une impulsion irrésistible, Les Prussiens ne tiennent pas sous ce choc terrible ; ils sont jetés hors de leurs positions, et nos soldats, continuant leur course furieuse, poussent devant eux comme un troupeau toute cette belle armée de parade, la mieux instruite de l’Europe. Le corps de Ruchel, qui tente de protéger la retraite, est culbuté par Soult; enfin, dans moins d’une heure la déroute de l’ennemi est complète, et nos

(1) C'est un des beaux exemples d'énergie que nous présente l’histoire des campagnes de l'Empire, car ces soldats, qui venaient de faire, sans murmurer,une étape de 63 kilomètres, étaient plus chargés que vous nele serez jamais, soldats d'aujourd'hui, et leur équipement vous semblerait singulièrement pénible à porter. La coiffure des fusiliers et chasseurs était le lourd et encombrant shako, qui avait en 1804 remplacé le chapeau de feutre. Et nos grenadiers portaient le fameux bonnet à poil, si profond qu'il leur tenait souvent lieu d'armoire à provisions : en arrivant sur le plateau d'Iéna, les grenadiers envoyèrent par compagnie une corvée de 25 hommes dans la ville déserte pour en rapporter du vin et du pain : les hommes de corvée remontèrent chargés de provisions, et portant chacun deux bouteilles dans le bonnet à poil.