Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

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breuses relâches, exige près de cinq heures; mais le passager est amplement dédommagé de ces lenteurs par les émotions de tout genre auxquelles il ne saurait échapper : il a contemplé en effet l'un des spectacles les plus grandioses que l’homme puisse voir se dérouler sous ses yeux.

Maîtres absolus de la Dalmatie, les Romains n'avaient pu négliger dans leur occupation le meilleur port de ses côles ; aussi une de leurs colonies avait pris de bonne heure possession des Bouches. Cattaro subsiste avec des vicissitudes diverses jusqu’au moment où les Sarrasins, dans le cours du neuvième siècle, s'en emparent et la mettent à sac. Rebâtie par des réfugiés venus un peu de partout, elle fait plus tard partie du grand royaume de Serbie, ou plutôt se constitue en une sorte de république qui y est à peu près incorporée, tout en conservant un semblant d'aufonomie. Les templiers en font au treizième siècle une de leurs forteresses, et s’y maintiennent jusqu'au démembrement de leur ordre redoutable. A la mort d'Étienne Ourosch, fils et successeur du grand Douchan (1367), Cattaro, pour ne point disparaître dans le naufrage de l'empire de Serbie, demande la protection de Louis de Hongrie qui, en 1378, laisse les Vénitiens s’en emparer et leur permet de la conserver jusqu'en 1380. Venise restitue alors sa conquête à Louis, mais la mort de ce dernier est le signal d’un nouvel asservissement pour Cattaro, qui passe sous le sceptre des rois de Bosnie. Reprise par les Vénitiens en 1419, elle appartient dès lors à l'histoire de la Sérénissime République. Mais dans ce long intervalle, assiégée deux fois par les Tures (1538 et 1657), décimée une fois par la peste (1572), ébranlée par plusieurs tremblements de