Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

CHAPITRE TREIZIÈME. 371

tombe le feu sacré dont il eût voulu animer son peuple tout entier.

Une année s'était à peine écoulée que, forcés par le: manque de munitions, les Monténégrins faisaient main basse sur les caractères typographiques de l'imprimerie de Pierre IT, et les utilisaient pour fabriquer des balles. Au milieu des préoccupations guerrières qui remplirent le règne si accidenté de Danilo I‘, la régénération intellectuelle de la principauté fut donc à peu près suspendue, et les presses oubliées sous la voûte du vieux monastère ne se réveillèrent que pour donner le jour à des œuvres insignifiantes, telles que l'Orlitch (VAïglon) ou calendrier de Tsettinjé, publication n’ayant guère que la valeur d’un almanach ordinaire. Nicolas If, lui-même, laissa s'écouler une dizaine d'années sans rétablir au moins dans leur état primitif les ateliers où tout conservait encore le souvenir de Pierre IT. Peut-être aussi la difficulté d'entretenir des ouvriers typographes, qu'il fallait chèrement acheter, était-elle pour quelque chose dans cette indifférence. Enfin, en 1870, le gouvernement ayant décidé la création d’un journal, on réorganisa l'imprimerie dans le vieux palais de Tscttinjé et l'on recruta les ouvriers les plus indispensables. La feuille hebdomadaire qui allait inaugurer au Monténégro le règne de la presse, reçut le nom de Tsernogorais (le Monténégrin), et eut pour principal rédacteur S. Popovitj de la Vojvodina, et pour gérant le secrétaire même du prince Nicolas, lovan Sundecic. Soumis à une censure sévère, le nouveau journal n’était point exposé à s’égarer dans les sentiers faciles du libéralisme où son rédacteur l’eût volontiers conduit; chaque article soigneusement élagué n'apparaissait que sous une forme assez châtiée pour ne