Le Royaume de Monténégro : avec une carte

MŒURS ET COUTUMES 29

en Autriche pour y chercher de l'ouvrage. N’en ayant pas trouvé, il s’en revint à Ljubotin, son village natal, situé à moitié chemin entre Ricka et Cettigné, et y arriva pendant la nuit. Épuisé physiquement et sans aucune ressource, il se cacha près de la maison où habitait sa mère, et attendit l'heure où tous ses parents se rendraient à leurs travaux, laissant la maison sous la garde de la vieille femme.

L'homme entra alors et demanda de l'argent à sa mère. Elle refusa de lui en donner et sortit de sa demeure pour se mettre sous la protection du chef du village. Celui-ci, homme âgé, se fit accompagner d’un voisin plus jeune, lequel réclama à Andréas son revolver et voulut le faire prisonnier. Andréas répondit : « Regardez comment je rends mon revolver, » et, en disant ces mots, il tira sur l’homme, qui tomba raide mort.

Le meurtrier s'enfuit ensuite dans la montagne, pourchassé par les parents de la victime. Quand ceux-ci le découvrirent, ils lui envoyèrent des coups de fusil. Andréas, qui n'avait pas été touché, usa de ruse, et se laissa tomber pour leur faire croire à sa mort, Le stratagème réussit et les meurtriers rebroussèrent chemin, pendant qu'Andréas se relevait et continuait sa fuite.

En route, il rencontra un de ses oncles, sur lequel il déchargea plusieurs coups de revolver; l’oncle ne fut pas blessé et riposta en tuant son neveu.

Le bruit des détonations arriva aux oreilles des gens qui avaient poursuivi Andréas. Furieux d’avoir été joués, et plus encore d'apprendre qu’un autre avait osé abattre celui qu’ils considéraient comme leur proie (suivant la coutume de la vendetta) ils insultèrent l'oncle. Celui-ci se découvrit la poitrine et leur dit : « Tuez-moi, que mon sang soit versé et que justice soit faite! » Mais, pour satisfaire complètement leur vengeance, ils ne voulurent pas tirer sur un homme âgé, et par conséquent de moindre valeur. Ils rentrèrent au village où, ayant rencontré un autre membre de la famille, beau jeune homme dont tous étaient fiers, ils tirèrent sur lui, sans, toutefois, le blesser mortellement. Le jeune homme répondit, de son côté, par des coups de revolver, tuant un des assaillants. On tirait toujours quand arriva Ja police qui arrêta tout le monde.