Le Royaume de Monténégro : avec une carte

€IVILISATION 55

négrin n’appartenant pas aux classes supérieures est végétarien de naissance et pour cause : le moindre morceau de mouton est un luxe qu'on n’entrevoit guère qu’en rêve.

Cependant, tous ces hommes sont beaux, nerveux, intrépides. Quel plus frappant exemple pourrait-on offrir aux détracteurs du végétarisme! Qu'ils aillent donc voir et admirer ces pauvres montagnards, et ils serant convaincus, à leur retour, que la viande n’est pas du tout indispensable dans la nourriture quotidienne. Les horloges publiques indiquent l'heure au gré de leur fantaisie, et personne ñe leur en veut, d’ailleurs, parce que personne n’a d’affaires pressantes.

Fréquemment, les gens du peuple se servent, pour indiquer le temps nécessaire à un parcours déterminé, d’un élément d'appréciation peu banal : la cigarette.

Voulez-vous savoir quelle distance vous sépare encore du but que vous voulez atteindre?

Informez-vous auprès d’un montagnard, qui vous répondra : Une cigarette, deux cigarettes! c’est-à-dire, allumez une cigarette, deux cigarettes, et quand elles seront fumées vous serez arrivé à destination. Soyez certain, au surplus, que vous aurez encore à marcher pendant vingt bonnes minutes quand vous en aurez rejeté le dernier bout, et ces indications n'ont qu'une valeur tout à fait approximative.

Le Monténégrin, comme l'Espagnol, est né gentilhomme. Même dans les milieux les plus pauvres et dans les coins les plus isolés, ces montagnards ont tous le port fier et altier, les gestes harmonieux, empreints de distinction et d'énergie. Mais ce sont d’incorrigibles bavards, véritables moulins à paroles, qui éton nent par leur verbiage, non toutefois dépourvu d’éloquence. Un de leurs plaisirs préférés est de se réunir pour lier une conversation sans fin. Leurs occupations n’en souffrent pas, car ils travaillent peu, étant par-dessus tout avides d'indépendance et de liberté.

Si leur existence est modeste, et souvent même misérable, la coquetterie est une de leurs grandes passions. Comme nous l'avons déjà dit, dans une autre partie de cet ouvrage, on verra