Le système continental et la Suisse 1803-1813

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La filature à la main était la seule occupation industrielle des petits cantons. Sa décadence contribuait également à la recrudescence du paupérisme dans cette région, déjà éprouvée par la campagne de 1799 et la diminution du transit.

Dans les districts d’Uri on ne filait guère que le coton ; dans ceux de Schwyz, Unterwald et Zug, on travaillait également la soie !. Survint la crise simultanée des fabriques de tissus de coton et des manufactures de soieries bâloises, le principal débouché des petits cantons. Elle jeta sur les chemins de nombreuses troupes de mendiants auxquels l’assistance publique, mal organisée, ne suffisait pas à porter secours ?.

Sur territoire grison, la filature s’était concentrée dans la vallée de la Landquart où elle occupait plusieurs milliers de personnes. Malgré l’inintelligence des autorités en matière industrielle 3, elle s’était développée dans de fortes proportions

Vaterlandes. Au printemps de 1813, cette population mourait littéralement de faim. Le pain, la viande et le lait étaient devenus pour elle choses inconnues. Le fond de sa nourriture se composait de tisane de chicorée et de pommes de terre. Il arrivait souvent que la récolte de pommes de terre faite en automne, fût déjà épuisée au mois de février. Schuler cite les traits de misère les plus incroyables; on avait vu, disait-il, des malheureux manger de l’herbe, des orties, des bêtes mortes. L'état de saleté des habitations étroites, où logeaient plusieurs familles entassées les unes sur les autres, favorisait la propagation des maladies. Hommes et femmes dormaient sur le sol ou étendus sur des planches. Des troupes de mendiants parcouraient le pays. C’est dans la vallée de la Linth et de la Sernft et autour du Kerenzerberg que la misère était la plus forte. Schuler cite parmi les localités les plus éprouvées Linththal, Reutti, Betschwanden, Schwandi, Engi. Dans la vallée moyenne, à Glaris, Ennenda et Mollis, où l'assistance publique était mieux organisée et où les tisseurs trouvaient encore quelques ressources, la situation était moins mauvaise.

Schuler, p. 4, 24, 98.

! Quelques districts du canton de Lucerne, probablement ceux qui touchaient au Freiamt argovien et à Zug, pratiquaient aussi la filature du coton ; mais l’industrie ne prit jamais dans ce canton des proportions sérieuses. Helv. Alm., 1804, p. 160.

? Gem. Schweizer, 1, p. 37; Il, p. 186; — [Æelv. Alm., 1805, p. 45, 75 ; 1807, p. 58.

$ Les gouvernements des Ligues, tout entiers à leurs intrigues politiques,