Le système continental et la Suisse 1803-1813

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Sur le marché de Saint-Gall où se concentrait en Suisse orientale tout le mouvement commercial des tissus légers, on vit annuellement dans les temps les plus prospères, 1787 à 1790, environ 100009 pièces de mousseline (longues de 20 m., larges de 3-4 m.); il s’en débitait en outre des quantités considérables à Hérisau, Teufen et autres places de moindre importance. Tous ces tissus unis ou façonnés servaient à la fabrication des vêtements de femme, des fichus légers, des cravates et des manchettes à la mode ; ils passaient aussi par milliers à la broderie !.

La broderie avait eu un développement encore plus rapide que l’industrie des mousselines dont elle était le complément naturel. Partie de l’ancien pays saint-gallois où l’introduisit vers 1753 la maison Gonzenbach, elle passa le Rhin et s’étendit avec une rapidité surprenante sur tout le Vorarlberg et la Souabe, formant bientôt un réseau immense dont les fils, par une organisation intelligente, venaient se concentrer entre les mains des industriels saint-gallois.

De nombreux agents apportaient aux brodeurs des campagnes le matériel nécessaire à leur travail, les filés de coton et la mousseline sur laquelle on avait préalablement tracé le dessin à la mode; quelque temps après, ils venaient chercher dans les chaumières le tissu brodé qu’on faisait blanchir à Saint-Gall et qu’on lançait ensuite dans le commerce.

Soucieux de développer sans cesse leur champ d'activité, les industriels des cantons envoyaient encore dans la ForêtNoire des brodeuses du pays pour enseigner leur art aux femmes et aux jeunes filles. D’autres commerçants à Bâle et lhumidité donnait au tissu une plus grande souplesse, Cependant, si Appenzell et Saint-Gall gardaient d'une façon générale sous la Médiation une suprématie évidente dans le tissage léger, Zurich paraît avoir eu, d’après un témoignage de l’époque, la priorité dans la spécialité des mousselines brochées. Helv. Alm., 1814, p. 217.

1 Wartmann évalue à 50 000 le nombre des pièces de mousseline qui,

dans ces mêmes années 1787-1790, passèrent annuellement à la broderie. Wartmann, p. 158.