Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

LA SÉPARATION ET LA LIBERTÉ 451

Au moment même où Bonaparte essayait de se servir d’elle pour amener Rome à ses vues ou, en cas de refus, se ménageait un schisme à exploiter, — lors de la convocation du dernier concile national de 1801, — l'évêque Lecoq, président du précédent concile, publiait une touchante lettre pastorale, dont ce passage mérite d’êlre cité comme le dernier écho de la pensée chrétienne et patriotique des curés «insurgés » de 1789:

« Quelques-uns d’entre vous sont alarmés de ce que nos églises sont dépouillées de tous leurs biens. En ceci encore adorez la providence divine. Vousle savez depuis longtemps, les impies osaient dire que la religion de Jésus-Christ n'étaitsoutenue que par les grands biens dont jouissaient ses ministres. Depuis longtemps aussi l'Église elle-même gémissait de voir entrer dans son sanctuaire des hommes qui n'y paraissaient conduits que par la vue de ses richesses. Le Seigneur a voulu du même coup confondre les blasphèmes des incrédules et faire cesser la cupidité scandaleuse de ses ministres. La religion qu’il fonda sans le secours des richesses, il veut aussi la maintenirsans ce secours indigne de lui. Quand Jésus-Christ appela ses douze apôtres, à quoi Les appela-t-il ? à la jouissance des biens, des honneurs ? non, mais au travail, à la peine, à la souffrance. Si donc, nous, ministres de Jésus-Christ, nous nous trouvons rapprochés de cet état apostolique, devons-nous en murmurer? Ah! plutôt réjouissons-nous de ce précieux dépouillement, en bénissant le Seigneur qui, par un coup admirable de sa sagesse, a ressuscité cet ancien état de choses que les plus pieux de ses enfants ne cessaient de regretter! »