Les hommes de la Révolution
ROME
de l'amour de la liberté ni le délire de la vertu pâlissent à la lecture. On convient que j'ai raison d'attaquer la faction corrompue qui domine dans l’Assemblée nationale, mais on voudrait que ce fût avec modération; c'est faire procès à un soldat de se battre en désespéré contre de perfides ennemis. » Il ,ajoutait:
« Je sais ce que je dois attendre de la foule des méchants que je vois soulever contre moi, mais l'intimidation ne peut rien sur mon âme; je me dévoue à la patrie et suis prêt à verser pour elle tout mon sang. »
On comprit qu'en effet tout système d'intimidation était presque inutile avec un tel homme. On ouvrit l'ère des persécutions. Le 5 janvier 1790, un sieur Boucher d’Argis, conseiller au Châtelet, appréhende au collet un: colporteur de l'Ami du Peuple et le traîne devant le commissaire de police (1). De tous côtés, on s’abat sur les imprimeurs qu'on menace, on arrête les colporteurs; on va jusqu’à publier des contrefacons du journal de Marat où on lui prête les idées les plus contradictoires et où on lui fait écrire les choses les plus saugrenues. Ce fut là, du reste, une des douleurs de Marat. Ce n'est pas tout. On soudoie des ouvriers pour qu'ils dénaturent la pensée de l’auteur (2). On va plus
(1) Ami du peuple, n° 95.
(2) Marat protesta souvent contre les fautes d'impression volontaires et contre les faux numéros de l'Ami du Peuple, mis en circulation. Le 8 septembre 1790, il écrit: « Un fripon maladroit vient d'en imposer au public en publiant sous mon nom une Lettre aw rot où l'Aini du peuvle au Père du peuple. Il ny a qu'un imbécile qui puisse me soupçonner de royalisme, »