Les serviteurs de la démocratie

244 LES SERVITEURS DE LA DÉMOCRATIE

cat n'avait pas seulement en partage l’éloquence enflammée. Il trouvait aussi en abondance les mots justes, les réparties alertes et les plaisanteries qui désarment. Un jour, M. le comte de Montalembert avait affirmé du haut de la tribune que la Révolution française n'avait accompli que des désastres, et il l'avait comparée à la cataracte du Niagara. « Pour tenir ce lan gage, répliqua Crémieux, à! faut avoir la cataracte sur les yeux! »

Sous l’Empire, le vaillant orateur, réduit à l’état de vaincu, se réfugia au Palais. Son cabinet d'avocat devint l'asile des jeunes gens d'avenir. Il enseigna à Laurier la science des affaires et à Gambetta la science du barreau. Ces deux hommes, destinés à une célébrité si différente, saluaient en Crémieux le meilleur des maitres et le plus bienveillant des amis.

Nous ne pouvons ici que rappeler en passant le beau rôle de Crémieux aux jours de l'invasion et pendant la durée du Gouvernement de la Défense nationale, dont il fit partie. Cet éloquent vieillard essaya d’adoucir les malheurs de la patrie.

À Tours et à Bordeaux, il se dévoua à la Pius sainte. des causes, la libération du territoire.

La dernière fois que le nom aimé de Crémieux reparut devant le pays, ce fut à propos des inondés de Toulouse. Il venait de leur envoyer cent mille francs! Nous n’avons jamais entendu dire que cette souscription démocratique ait été égalée par aucune souscription princière ?

Adolphe Crémieux, l’homme d'esprit, finissait en homme de cœur. Ce dernier acte a été le digne couronnement de sa carrière, Il est de ceux dont on aura le droit de dire : I! a passé en faisant le bien.