Les serviteurs de la démocratie

EDGAR QUINET 255

l'armée le gouvernement rétabli en 4815 par la coalition triomphante des Cosaques, des Prussiens et des Anglais. À la suite de cette détermination, Edgar Quinet se mit à étudier le droit et surtout la littérature, qui l'attirait de plus en plus. Afin de se tenir au courant de la philosophie allemande et anglaise, il apprit ces deux langues, puis alla faire un voyage en Allemagne. Là, il vit de près les personnages célèbres de cette nation, se lia avec eux et entra vite dans leur intimité. Il connut surtout l’illustre Creutzer, l’auteur de la Symbolique, une des œuvres les plus puissantes du génie allemand. Un jour, Creutzer dit à son jeune ami : (Il m'arrive une chose extraordinaire! — Quoi donc, mon cher maitre? — Eh bien, je ne puis comprendre la philosophie allemande que si elle m'est expliquée par un Français. — Cela ne m'étonne pas, reprit Edgar Quinet, pour descendre dans un caveau, il faut une lanterne. » Et Quinet, qui connaissait à fond l’Allemagne, ajoulait, après avoir raconté cette anecdote : « Tous les livres allemands modernes qui ont une chance d’avenir ont reçu à un degré quelconque le souffle du génie français. Au contraire, tous ceux qui sont restés purement allemands sans aucun reflet de la France sont des œuvres teutonnes, excentriques, éphémères, qui n’entreront jamais dans le domaine de l'esprit humain. »

Après s'être préparé par des études fortes et variées à l’enseignement littéraire et philosophique, l’éminent écrivain, qui s’était fait connaître par de savantes publications de philosophie, de voyages et d'histoire, ambitionna une chaire. Il fut nommé professeur de littérature étrangère à la Faculté des Lettres de Lyon. Il y montra qu'il était merveilleusement doué pour l’enseignement supérieur. M. de Salvandy, l’homme aux petits ridicules mais aux sentiments libéraux, était alors