Mémoire sur la Bastille

4 MÉMOIRES SUR LA BASTILLE

personne ne l’a mérité : les innocens, parce qu’ils sont innocens ; les coupables, parce qu'ils ne doivent être convaincus, jugés, punis, que suivant les lois, et qu’on n’en suit aucune, ou plutôt qu’on les viole toutes à la Bastille ; parce que, si ce n’est en enfer peut-être, il n’y a pas de supplices qui approchent de ceux de la Bastille, et que s’il est possible de justifier l'institution de la Bastille en elle-même, dans de certains cas, il ne l’est dans aucun d’en justifier le régime : il faut faire voir que ce régime, aussi honteux que cruel, répugne également à tous les principes de la justice et de l’humanité, aux mœurs de la nation, à la douceur qui caractérise la maison royale de France, et surtout à la bonté, à l'équité du souverain qui en occupe aujourd’hui le trône.

C’est par cette discussion que je vais consacrer

première fois, réfugié à Londres, A ce propos, Voltaire écrit à Mallet du Pan l’ainé : « Vous allez dans un pays devenu presque barbare par la violence des factions, C’est un de mes grands chagrins que l’homme éloquent que vous y verrez soit malheureux... A combien d’embarras ce grand ouvrage politique hebdomadaire va l’exposer ! C’est une chose si délicate que de vouloir rappeler à une nation ses intérêts, lorsqu'elle s’est privée elle-même de tous les moyens de régénération. » Il s’agit des Annales politiques et littéraires, dont le succès prodigieux suscita jusqu’à onze contrefaçons. Linguet en reprit la direction après sa sortie de la Bastille et son évasion de Réthel. C’est dans cette feuille que parurent d’abord les Mémoires sur la Bastille.