Mémoires du général Baron Roch Godart (1792-1815)

ITALIE ET CORFOU 59

Le général gouverneur me désigna, dès notre arrivée, commandant de la place de Corfou et de toute l’île, qui renfermait à peu près douze cadres de régiments vénitiens, ayant plutôt l’air de vétérans que de soldats. ainsi que quatre à cinq cents Esclavons, ressemblant à des barbares.

Je devais ménager toutes ces troupes pour éviter toute espèce de rixe. Il me fallut aussi chercher à gagner la confiance des différentes autorités vénitiennes, tant civiles que militaires. Je fis en conséquence maintenir la plus grande discipline parmi nos troupes. Je m’abouchai avec les personnes le plus en crédit du pays pour obtenir des renseignements qu’il m'importait de connaître sur l'ile.

J'appris qu’une bande de déserteurs vénitiens, de for çats et de condamnés aux travaux publics, existait dans l'intérieur de l'île, les uns travaillant chez les habitants, les autres les désolant par des brigandages. Soit néglisence des chefs, soit faiblesse, on n’était pas encore parvenu à en arrêter aucun, bien que cette bande existât depuis plusieurs années.

Je conçus sur-le-champ le projet de purger seul l’île de Corfou deces brigands, et la manière dont je m'y pris me réussit parfaitement.

Comme je voulais être seul pour exécuter mon projet,

1 Leur effectif officiel était de 3,828 hommes dont 1,000 Esclavons, les seuls à montrer des qualités militaires. Les troupesitaliennes furent tenues à l'écart, et les Esclavons renvoyés en Dalmatie.

Godart réclama les 117 soldats et les 27 officiers de ses trois bataillons, qui étaient restés dans.le dépôt de la 79 établi à Mestre, quartiergénéral de Baraguay-d'Hilliers. Celui-ci lui envoya 61 soldats et 18 ofliciers (le reste appartenait au 1°" bataillon), et la compagnie decanonniers attachée à la demi-brigade (thermidor, août).

Peu de temps après, Bonaparte réclama directement au Directoire (2 messidor, 16 août) le {°° bataïllon de la 79, toujours à Avignon.