Mémoires du général Baron Roch Godart (1792-1815)

104 MÉMOIRES DU GÉNÉRAL GODART

pas, et si l’on eût été sûr de trouver en arrivant à la rive des bâtiments de transport pour le traverser, il aurait été beaucoup plus court de prendre cette voie, qui, tout en nous faisant éviter des chemins longs et affreux, ainsi que plusieurs montagnes où l'ennemi s'était retranché, nous aurait conduits directement sur la hauteur de Bosanka ‘, dernière position dominante de Raguse, et d'où les Monténégrins et les Russes bombardaient cette ville avec la plus grande facilité.

Mais il ne fallait point penser à prendre cette route. Toutes les probabilités s'y opposaient, et j'en détournai le général qui s’en était ouvert à moi, et s'en rapporta à mon avis.

En conséquence, le 6, à la pointe du jour, toute la colonne réunie se mit en marche longeant le canal ?. A onze heures du matin, nous arrivâmes à la source, et nous fimes une halte de demi-heure pour nous rallier ; deux canonnières russes qui, comme je l’avais supposé, se trouvaient dans le canal, nous ayant aperçus, le remontèrent et, tout en signalant notre apparition, tirèrent à boulet sur la colonne *?. Les Dalmates, qui étaient sans doute peu! habitués à un pareil bruit, et sur les apparences desquels on comptait beaucoup pour la fin de la journée, s’eftrayèrent du boulet, et décampèrent

? Sur le plateau de San-Sergio.

2 On suivait, sur les crêtes que contournent le val et le canal de l'Ombla, le chemin de Bergatto. Une relation porte qu'on fit d’abord passer et repasser deux compagnies le long de l'Ombla au pied du rempart de rochers, bien en évidence, pour tromper l'ennemi sur la direction de notre marche.

3 Une relation fait croire qu'elles tirèrent dès la veille. Mais, la veille, Godart n'avait que supposé que leur présence. Ces canonnières n'étaient pas les seules. Molitor parle de l'Ombla couverte de canonnières, qui coopéraient avec l'armée russe et les bâtiments de la pleine mer à l'investissement de la place.