Mémoires du général Baron Roch Godart (1792-1815)

106 MÉMOIRES DU GÉNÉRAL GODART

garde dont la nécessité de marcher homme par homme allongeait et retardait la marche, et pour contenir en même temps le fort rassemblement de Monténégrins qui se tenait là en observation, sur la montagne opposée à Bergatto.

Aussitôt l’arrivée de l’arrière-garde à ma position, je me mis en marche avec mon bataillon pour rejoindre le premier. Le fort venait d'être pris d'assaut, et les Russes, abandonnés par les Monténésrins, se mirent en pleine retraite sur Bosanka ‘ leur dernier retranchement, où on ne leur donna pas le temps de s'arrêter ?, tant nos premiers succès, en déconcertant l’ennemi, avaient ajouté à l’ardeur des soldats! I1 n’eut pas la possibilité de rien emporter. Canons*, bagages et munilions, tout fut abandonné par les Russes qui se retirèrent sur Gravosa où ils s'embarquèrent.

La ville était au pied de la hauteur que nous occupions, et beaucoup doutaient encore que ce püt être Raguse. On n'y découvrait âme qui vive, et on doutait que la garnison püt y êlre, et ne pas avoir entendu les coups de fusil tirés sur la montagne. Je proposai au général de division un moyen bien simple pour nous faire apercevoir, et nous assurer en même temps si les Français étaient toujours dans Raguse. C'était de faire réunir tous mes tambours sur le point le plus découvert, de leur faire battre des marches françaises, et de

*-Exaltés par le souvenir des cruautés exercées lors du combat du 17 juin, et par le cri de : Vive l'Empereur ! nos soldats s'élancèrent, sans tirer, sur la position de Malini ou le Ier corps russe les arréta un instant. Mais, abandonnés par les Monténégrins et craignant d'être coupés, ils évacuèrent Bergatto, et se mirent en bonne position derrière Bosanka.

* On les chargea à la baïonnette,

* Quatre canons, trois mortiers.