Mémoires sur Naigeon et accessoirement sur Sylvain Maréchal et Dalalande : lu à l'Académie des sciences morales et politiques

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rien de ceux qu'il pouvait avoir, toujours fort préoccupé, préoccupé jusqu'à la manie de ses pensées d’athéisme, lesquelles ne sont jamais un attrait pour ces âmes, auxquelles un fond de religion, comme aux faibles , reste toujours, même en leurs plus mondains engagements , il devait peu plaire aux femmes et il les recherchait peu. Il ne se maria pas , il aimait ailleurs, il aimait ses livres, sa plus grande passion, après celle de l’athéisme. Il en était curieux, soigneux et ambitieux ; il leur donnait son cœur avec son esprit; et quand un jour, par nécessité, pour suflire, dans sa vieillesse, aux frais d’une grave maladie, il crut devoir se séparer d'eux, d'eux qu'il avait recherchés, rassemblés et arrangés pour lui, avec tant de persévérance et de sollicitude, ce fut presque comme s’il perdait d'anciens amis, qu'il aurait réunis autour de lui, avec toutes sortes de soins, afin d'en former son assidue société.

Ileut toutefois une première consolation dans son malheur, ce fut, dirai-je, de les vendre, non quoique ce soit le mot propre, mais de les livrer, de les confier aux mains d'un homme, M. Didot père, qui savait, lui aussi, les goûter et les apprécier; il en eut une seconde , mais celle-ci bien imparfaite , ce fut de recommencer , quand il le put et comme il le put, sa studieuse collection , et de se faire de sa nouvelle bibliothèque , comme une seconde famille, qui ne valut toutefois jamais la première , les anciens et les premiers amis.

Du reste, avec quelques-uns du moins, il en usail assez librement, quelque affection qu'il leur portt ; car il est tel exemplaire sorti de ses mains, un Tacite entre autres, qui a élé trouvé couvert par lui de notes, et qui même, si jen