Mémoires sur Naigeon et accessoirement sur Sylvain Maréchal et Dalalande : lu à l'Académie des sciences morales et politiques

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sitions du cœur humain ? Eh ! quoi, ne rien comprendre à cette consolation par la résignation, à ce courage de l’humiJité, quand surviennent ces extrêmes et terribles épreuves, où il n'y a plus pour satisfaire à la Joi de notre nature qu'à courber la tête et à plier le genou, et sous le coup même de l'afliction à redoubler d'amour, de confiance et d'espérance en celui qui nous conduit par la douleur comme par la douceur à notre souveraine fin! Quoi, ne rien soupconner de ce besoin d’un dernier et absolu recueïllement, à heure où va se résoudre, dans le funèbre mystère et le saisissement de la mort, selon l'ordre de l’éternelle justice, la question de la vie future ! en vérité, faute d’une idée, de la simple idée de Dieu, c'est bien peu pénétrer dans le secret de l'humanité.

Mais voyons par opposition, toujours d’après notre auteur, comment vit l’homme sans Dieu : « il sort, dit-il, des bras de sa femme ou du sommeil, pour assister au lever du grand astre; et comme il remplit sa journée de travaux et de soins, tous, il est vrai, étrangers à Dieu, il ne connaît pas l’ennui et s’endort satisfait de n'avoir laissé aucun vide dans sa journée modelée sur le cours du soleil. »

Je ne voudrais pas trop multiplier les remarques, quand d’ailleurs elles sont si simples et se présentent comme d’ellesmêmes; cependant il me semble qu'il ne faudrait pas laisser ici passer sans quelques observations cette complaisance de l’auteur à nous retracer la vie de l’athée comme si sereine, si pleine, si parfaitement exempte d'ennui. D'où vient en effet l'ennui? N'est-ce pas de l'absence dans notre esprit et dans notre cœur d'un grand objet à croire, d'un grand objet à aimer, de celui qui par-dessus tout est le mieux fait pour occuper notre pensée et notre amour, qui est l'intelligible et