Napoléon Bonaparte, drame en six actes et en vingt-trois tableaux

NAPOLÉON. 11

cuantes. Douze cent mille francs !

JOSÉPHINE. Oh! d’abord tout cela n’a point passé à ma toilette... — N’ai-je point mes pensions aussi... — Mes veuves , mes orphelins? Üne main qui se tend vers moi peut-elle s'éloigner vide ?

CHARLES. Oui, je sais que vous êtes bonne.

JOSÉPHINE. Si vous saviez comme cela fait du bien de donner! — Puis je leur dis de prier pour le premier consul. pour moi.

CHARLES. Pour vous !... et que pouvezvous désirer ?

30SÉPHINE. Charles... je suis quelquefois bienmalheureuse !... — Ah! ce n’est point Bonaparte qui... non, vous savez s’il est bon avec moi! — Mais empereur , empereur , sera-t-il toujours Le maitre”... — Charles, vous at-il jamais parlé de divorce ? ;

CHARLES , »vement. Jamais.

3oséPmiNE. Oh! s’il vous en parlait, Charles, au nom du ciel! au nom de ce qu’il y a de plus sacré au monde. —Oh! le voilà, je l’entends.…. Je me sauve. .… Charles, ne lui parlez pas des six cent mille francs qui restent. .….. Plus tard... plus tarde

cnarzes. Et le bon sur le trésor?

3osÉpmiNE. Ah! donnez, j'oubliais.

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SCÈNE IV.

BONAPARTE, CHARLES, ux HUISSIER. :

BONAPARTE, à l'huissier. Un homme viendra ce matin; — il prononcera ces deux mots : Toulon et liberte. Vous me l’amènerez par cette porte. ( L’huissier sort.) Àsseyez-vous, Charles, nous aurons de la besogne aujourd’hui. Avez-vous les journaux? que disent-ils ?

CHARLES. Les journaux français ?

BONAPARTE. Non, ils ne disent que ce que je veux; je sais d'avance ce qu'il y a dedans... — Les journaux étrangers?

CHARLES. Les journaux anglais parlent de la guerre, et protestent de leur amour pour la paix.

BONAPARTE. Leur amour pour la paix! —Et pourquoi alors n’observent-ils pas le traité d'Amiens? Pourquoi s’obstiment-ils, contre toutes leurs promesses, à garder Malte, l’entrepôt de la Méditerranée, le relais de l'Egypte? —J'aimerais mieux leur abandonner le faubourg Saint-Antoine.

COCOE00 2100000000 000000000000 200000 000800

SCENE V.

Les Mêues, L'HUISSIER , puis L'ESPION.

L’uuissier. Voilà la personne qu’attend le citoyen premier consul. (L'espion entre enveloppé d’un manteau, Charles

veut se retirer; Bonaparte lui fait signe de

rester.)

BONAPARTE , à l’espion. Eh bien! qu'y a-t-il de nouveau ?

L'ESPION | montrant Charles. Nous ne sommes pas seuls.

BONAPARTE. Parlons bas... Que dit-on du couronnement?

L’Espion. C’est le vœu général.

BoxArARTE. Étles jacobins, complotentils toujours ?

L’ESPION. Vous êtes prévenu contre eux; ce ne sont point les Jacobins qui sont à craindre, ce sont les royalistes.

BONAPARTE. N'importe, ma police est mal faite.

L’Eespion. Je le crois.

BONAPARTE. J'ai manqué d’être assassiné hier à Saint-Cloud. je

L'EspPion. Je le sais. #

BONAPARTE. Comment ?

L'ESPION. J'y étais.

BONAPARTE. Qui t'y avait envoyé ?

L'ESPION. Personne.

BONAPARTE. Un homme me sauva la vie:

L’EsPrON. En se jetant éntre vous et l'assassin. BonAPaRTE. Et il a reçu le coup.

L'ESPION , ouvrant son manteau el MON trant son bras. Dans le bras.

BONAPARTE , oprès un silence. Comment! c’est toi?

L'ESPION. Vous voyez qu’un espion peut être bon à autre chose qu’à faire la police ; — quand ce ne serait qu’à servir de gaîne à un poignard !.…

BONAPARTE. Que puis-je faire pour toi? que veux-tu ?

L’ESPION. Pour moi! et quels sont les

4itres ou le rang que lon accorde à un es-

pion? On lui donne de l'or, et vous ne m'en laissez pas manquer; on lui donne des ordres, —et j'attends les vôtres. BonarartE. Eh bien! retourne au milieu du peuple, au milieu duquel Je vais passer dans une heure pour aller à NotreDame, Dis que l’empereur Napoléon chérira encore plus ses sujets que le premier consul n’aïmait ses concitoyens. Dis... dis enfin tout ce que ton dévouement pour moi t'inspirera. ( L’espion sort.) Que cet homme est bizarre ! dl