Orateurs et tribuns 1789-1794

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Donc Fabre haït l’inoffensif Colin d’une envie que le succès ne désarme point et, dans sa préface du Philinte, avec un acharnement inouï, une amertume odieuse (c’est ainsi que plus tard il calomnia et poursuivit les Girondins luttant contre la mort), — il présente le théâtre de son rival comme une école d’aristocratie, de réaction, de vicet.

« L’optimisme de notre héros, dit-il, n'est que l’égoïsme qui loue la force et s’accommode de l’injustice. Votre Plainville proclame que les nobles ont seuls droit au bonheur :

Tout est si bien arrangé dans la vie Que la moitié du monde est par l’autre servie.

Et quand votre Picard dit à Plainville: Pourquoi ne suis-je pas de la moitié qu'on sert? Plainville répond allègrement : « Parce que tu n’es pas de la moitié qui paie. »

Et alors, comme s'il pérorait à la tribune de la Convention, Fabre éclate :

« — Quoi! le peuple toujours opprimé, toujours dévoré, et dans les campagnes où, comme Tantale, entouré des fruits de la terre et des biens du ciel, il languit et périt de faim et de misère; et dans les ateliers..., et dans les armées..., et dans les

1. M. Aulard, l'historien dantoniste, appelle ce réquisitoire une véritable harangue de Cordelier ou de Jacobin.